Assurance : faire face à de nouveaux risques

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Dépendance, nucléaire, OGM, stress au travail… Les parlementaires et les professionnels de l’assurance se sont penchés sur les nouveaux risques lors d’une conférence parlementaire le 27 novembre 2012. Deux tables rondes ont été organisées pour mieux cerner les nouveaux défis auxquels doit faire face la profession.

Le député européen Jean-Louis Cottigny ouvre les débats en expliquant que les nouveaux risques sont de diverses natures : risques technologiques, risques psycho-sociaux, risques de dépendance, risques environnementaux pour ne citer qu’eux. Le domaine de l’assurance doit maintenant réinventer la protection et la prévention. Les entreprises doivent aussi être intégrées à ces démarches de prévention.Il rappelle que la Commission européenne a lancé des « dialogues » sur ces risques et sur leurs évaluations. Il s’agit d’encourager des meilleures pratiques d’évaluation des risques dans un cadre de coopération européenne.La directive Solvabilité II doit aussi renforcer la prise en compte du risque pour les assureurs d’ici 2014.

Yves Censi rappelle que le risque est le fait générateur de richesses économiques : « Sans risque, il n’y a aucune création de valeur ». L’entrepreneur crée de la richesse en prenant un risque. Ce risque d’entreprise n’est pas assurable. C’est le fondement de l’économie.Dans le domaine financier aussi, c’est le risque qui fait la valeur d’un placement. Aucun placement ne peut être sûr et rémunérateur en même temps. La prévention des risques financiers doit d’ailleurs être renforcée selon le député.

1ère table ronde : Une assurance moderne pour répondre aux nouveaux risques

Une assurance moderne pour repondre aux nouveaux risques On retiendra en particulier les propos de Jean-Pierre Daniel, Stéphane Pénet et Gérard Bekerman.

Jean-Pierre Daniel, ancien agent général, enseignant, a écrit un ouvrage sur « Les 12 défis de l’assurance ».Pour l’auteur, l’assurance est un outil moderne et efficace.D’une part, elle complète le rôle de l’État. Par exemple, la mutuelle complète le régime d’assurance santé obligatoire. Autre exemple, le Fonds de Garantie Automobile, créé en 1951, indemnise les victimes d’accidents de voiture pour lesquels aucun responsable ne peut être identifié.D’autre part, l’assurance a réussi à faire face à tous les sinistres survenus, y compris le 11 septembre 2001, l’ouragan Katrina ou plus récemment Fukushima.L’assurance régule les comportements des assurés en « frappant au portefeuille ». Par exemple, un automobiliste qui conduit bien voit sa prime d’assurance baisser. Autre exemple, les entreprises qui ont trop d’accidents du travail payent une cotisation plus élevée.Enfin l’assurance a su créer de nouveaux produits pour faire face aux nouveaux défis. Un exemple : la France dispose du meilleur système d’assurance privé pour la dépendance avec déjà 1,7 million de personnes assurées.

Stéphane Pénet, directeur des assurances de biens et de responsabilité de la Fédération Française des Sociétés d’Assurance (FFSA) expose les limites de l’assurance dans sa capacité d’appréciation des risques nouveaux.Pour évaluer un risque, l’assurance utilise trois méthodes : l’actuariat qui regarde le passé pour anticiper statistiquement l’avenir, l’assimilation c’est-à-dire l’appréciation d’un nouveau risque comme un autre risque qui lui ressemble et la modélisation mathématique à partir de données scientifiques fournies par des experts.Les risques émergents sont des risques pour lesquels aucun consensus scientifique n’a été trouvé. Les experts ne peuvent fournir de chiffres utiles à la modélisation. Exemples : les OGM, les antennes téléphone, etc. Ces risques ne peuvent être appréciés, donc ne sont pas assurables.Pour faire face à ces nouveaux aléas, les compagnies d’assurance ont plusieurs possibilités : investir dans la recherche, trouver de nouvelles solutions de transfert de risques comme le partenariat et développer la prévention.

Gérard Bekerman, président de l’Association Française de l’Épargne et de la Retraite (AFER) s’intéresse à l’assurance-vie et plus particulièrement au risque de changement de sa fiscalité. « La plus grande catastrophe naturelle serait que les pouvoirs publics s’occupent de l’assurance-vie » lance Gérard Bekerman pour commencer son intervention. Il rappelle que l’assurance-vie permet à parts presque égales de financer l’État et les entreprises.Selon Gérard Bekerman, l’assurance-vie n’est pas une niche, « elle rapporte plus qu’elle ne coûte ». C’est pourquoi il recommande vivement aux pouvoirs publics de ne plus toucher à la fiscalité de l’assurance-vie qui a besoin de pérennité et de continuité.

2ème table ronde : Les risques sociétaux

Une assurance moderne pour repondre aux nouveaux risques Les principaux risques sociaux sont la santé, la retraite et la dépendance (la perte d’autonomie).

Valérie Rabault, députée du Tarn-et-Garonne, ouvre les débats avec un rappel sur le vieillissement de la population française, même si la France est le pays européen le plus dynamique en ce domaine avec plus de 2 enfants par femme ; et sur les besoins d’organiser cette population sur le territoire.

Xavier Bertrand, ancien ministre du Travail, député de l’Aisne, insiste sur la prévention des risques liés à la santé. « La prévention ne peut se dissocier de la responsabilisation ».Il prône, au nom de la justice sociale, une simplification du système de prévention pour être plus efficace, et ce, dès le plus jeune âge comme par exemple les opérations pour la santé bucco-dentaire, la prévention obésité, etc.

Fabrice Pesin est secrétaire général adjoint de l’ACP, qui contrôle notamment tous les organismes de prévoyance. Selon lui, « ce ne sont pas de nouveaux risques mais des risques anciens dans un nouveau contexte ». Il s’interroge sur le caractère assurable de tous ces risques sociaux. Si la santé et la retraite sont parfaitement assurables, il n’en est peut-être pas de même pour la dépendance. Beaucoup d’inconnues sur l’évolution de ce risque persistent et nous n’avons pas encore le recul nécessaire à une bonne évaluation de ce risque. Une possibilité est de développer les partenariats entre les assurances et les pouvoirs publics comme c’est déjà le cas pour le PERP ou les dispositifs Madelin. Jean-François Husson, ancien assureur, sénateur de Meurthe-et-Moselle, propose quant à lui un mode de financement avec un partenariat entre les pouvoirs publics et les compagnies privées. Comme pour la santé, une partie serait financée par des cotisations et une partie serait financée par les individus eux-mêmes en souscrivant une complémentaire dépendance.Selon lui, l’entreprise est un nouveau territoire de santé sur lequel il faut travailler. Anne Saint-Laurent, d’ AGIRC-ARRCO (retraite complémentaire), complète les propos du sénateur. Elle précise qu’on vit plus vieux mais moins bien. Les actions doivent donc permettre de « bien vieillir ». Jean-Pierre Aquino, gériatre, avance que prévenir la dépendance, c’est aussi la prévoir. Enfin, Laurent Hémery, directeur général d’un cabinet de consultant conclut les débats sur la prévention de la dépendance.

D’autres thèmes ont été évoqués, comme le sujet de la responsabilité civile des professionnels de santé et la difficulté grandissante de certains médecins (gynécologues, échographes, chirurgiens et anesthésistes) de s’assurer et le risque subséquent qu’ils refusent d’effectuer des actes jugés « à risques », celui de l’intégration de la santé aux politiques d’entreprise ou encore la question des risques liés à Internet.