Cela a ouvert la voie à la décision prise le 12 mars par les ministres des finances de débloquer une partie des 130 milliards d’euros de prêts publics européens constituant le deuxième plan de sauvetage de la Grèce. Le 15 mars, le FMI devrait décider pour sa part l’octroi à la Grèce d’un crédit de 28 milliards d’euros, dont 9,7 milliards d’euros déjà inclus dans le premier programme d’aide de mai 2010.
Quel est l’enjeu de la restructuration de la dette grecque ?
Sans cette restructuration, la Grèce aurait dû se déclarer en défaut de paiement, c’est-à-dire qu’elle aurait arrêté de payer ses dettes. La Grèce serait alors un pays en faillite. Il y aurait un risque de contagion aux autres pays les plus faibles de la zone Euro tels que l’Italie, l’Espagne ou encore le Portugal. Au-delà, ce sont les fondements de l’union monétaire européenne qui pourraient être remis en cause.
En quoi consiste la restructuration de la dette grecque ?
Avant la restructuration, la dette publique grecque était d’environ 360 Milliards d’euros, soit environ 160 % de la production nationale annuelle de la Grèce. Elle se décomposait en 155 milliards d’euros détenus par le secteur public international (FESF, BCE, FMI) et 205 milliards d’euros détenus par des créanciers privés.
La restructuration ne concerne que les créanciers privés. Elle permet d’effacer 107 milliards d’euros de dette.
Qui sont les créanciers privés ?
Il s’agit de banques, de compagnies d’assurances, de fonds d’investissement et de fonds de pension qui ont souscrit à des obligations de l’État grec. La dette grecque est détenue à 57 %, soit 206 milliards d’euros, par des créanciers privés sous forme d’obligations. Environ 86 % de ces obligations, soit 177 milliards d’euros relèvent du droit grec, le reste soit 29 milliards d’euros relèvent du droit international.
Le mécanisme de la restructuration
La restructuration prend la forme d’un échange des anciennes obligations contre des nouvelles obligations de valeur plus faible et de durée plus longue. Une obligation d’un montant initial de 100 € est échangée contre une obligation de 46,50 € dont 31,50 € d’obligations grecques et 15,00 € de titres émis par le FESF (Fonds Européen de Stabilité Financière). Cela représente donc pour les créanciers une perte de 53,50 €.
Toutefois, la durée de ces obligations a été allongée. Les obligations grecques sont sur 30 ans alors que les obligations du FESF sont sur un an pour moitié et deux ans pour l’autre moitié. En outre, leur taux d’intérêt est beaucoup plus faible. Il sera progressif avec le temps : 2 % jusqu’en 2015, 3 % de 2016 à 2020, 3,65 % en 2021, 4,3 % entre 2022 et 2042. La perte engendrée est de ce fait bien supérieure à 53,5 %.
Pour mieux comprendre les obligations
L’État grec avait déclaré n’accepter cette solution que si au moins 75 % des créanciers privés acceptaient « volontairement » les termes de la restructuration.
Que s’est-il passé le jeudi 8 mars 2012 ?
Le 8 mars 2012, les créanciers concernés ont accepté « volontairement » l’échange pour 83,5 % des obligations totales, cela correspond à 85,8 % des obligations de droit grec. Le souhait de la Grèce est de convertir l’ensemble de sa dette à l’égard des créanciers privés. Pour les créances qui relèvent du droit grec, elle a adopté il y a moins de quinze jours une loi qui lui permet de forcer les créanciers réticents à accepter cet échange d’obligations : les clauses d’action collectives.
Cela lui permettrait de relever le taux d’acceptation à 95,7 %, soit 197 milliards d’euros sur le total de 206 milliards. En effet, elle ne peut pas contraindre les créanciers d’accepter le plan pour les obligations relevant du droit international. Elle leur laisse alors un délai supplémentaire pour accepter l’échange, jusqu’au 23 mars pour accepter un même plan.
Si la Grèce fait intervenir les clauses d’action collectives, cela peut être interprété comme un « événement de crédit » comme l’appellent les analystes financiers. Dans ce cas, la procédure n’est alors plus « volontaire », ce qui permet de déclencher le paiement des CDS, des produits financiers permettant de s’assurer contre la faillite d’un créancier.
Quelles conséquences pour les épargnants français ?
Les conséquences de cette restructuration de la dette grecque sur la France devraient être minimes. Seuls les contrats d’assurance-vie pourraient être concernés par une baisse de leurs rendements. Cependant, les investissements en dette grecque représentent moins de 1 % des portefeuilles, l’impact est donc très faible. Parmi les créanciers privés qui ont accepté l’échange d’obligations, on retrouve, entre autres, BNP-Paribas, la Société Générale et Dexia.
Quelles sont les conséquences de cette restructuration ?
Actuellement, la dette publique grecque représente plus de 160 % de son PIB. Suite à cette restructuration, le poids de la dette de la Grèce diminue. L’objectif est réduire le poids de la dette à 120,5 % d’ici 2020. En outre, c’était la condition pour que le prêt de 130 milliards d’euros accordé par l’Union Européenne, la Banque Centrale Européenne et le Fonds Monétaire International soit débloqué. La Grèce n’est donc pas en cessation de paiement.
Les créances du secteur privé vont diminuer d’environ 100 Milliards. Mais la dette publique totale de 360 Milliards devrait avoir diminué seulement de moins de 60 Milliards d’ici la fin 2012. En effet les créances des préteurs publics vont augmenter d’ici la fin de l’année de près de 50 Milliards correspondant d’une part à un versement de 30 Milliards du FESF dans le cadre du plan de sauvetage et d’autre part à quelque 18 Milliards de déficit public grec estimé pour l’année 2012, que la Grèce aura bien du mal à financer sur les marchés privés. Par ailleurs, la Grèce est plongée dans une véritable dépression. Cela fait 4 années que la production nationale recule sans discontinuer. Au 4ème trimestre2011, la production nationale était en recul de 7,5% par rapport au 4ème trimestre 2010.Le taux de chômage dépasse les 20%.. S’il n’y a pas une reprise rapide de l’économie, ce qui parait difficilement envisageable dans le contexte de la politique très restrictive appliquée à la Grèce, le poids de la dette recommencera d’augmenter et redeviendra insoutenable, à plus ou moins longue échéance.