L’épargne joue-t-elle pleinement son rôle ?

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Les 24 èmes rencontres parlementaires sur l'épargne se sont tenues le 18 février 2015, à Paris. Elles essayaient de répondre à la question : l'épargne joue-t-elle pleinement son rôle ? autour de deux tables rondes animées par la journaliste Christine Kerdellant. Des parlementaires, des professionnels de l'épargne, des économistes se sont relayés pour proposer des solutions de nature à donner envie aux Français d'investir dans les entreprises.

En guise d’introduction aux débats, Alain Tourdjman, directeur des études économiques et de la prospective de BPCE, a exposé les données essentielles de l’épargne aujourd’hui. Avec un taux d’épargne de 16 %, à peu près stable depuis 20 ans, la France se situe en tête du peloton européen, juste derrière l’Allemagne et la Suisse. Le pouvoir d’achat en berne et des taux d’inflation très faibles auraient dû conduire à une baisse de ce taux. Qu’en sera-t-il dans les prochaines années ? Pour certains, il s’agit d’une épargne de précaution, le taux devrait finir par baisser. Pour d’autres, il s’agit d’une épargne d’anticipation (retraite, dépendance, enfants…). Et dans ce cas, le taux devrait rester stable.

Si le taux n’a guère varié, on a assisté en 2014 à une modification assez sensible des placements : baisse du livret A concomitante à une hausse du PEL et de l’assurance vie. L’inverse de ce qui s’était produit en 2012. Mais cette grande flexibilité s’est faite au sein d’un univers très étroit (épargne sécurisée). 

Autre constat intéressant : le flux de placements financiers nouveaux est historiquement faible (45 % de moins qu’en 2010/2012, en baisse de 40 à 50 milliards d’euros).

Chiffres clés Epargne

  • 38 % assurance-vie vie ,

  • 5 % en actions en direct,

  • 18 % en actions en direct et indirect

Epargne financière 4600 Mds €

Les Français averses au risque

Tous les intervenants se sont accordés sur le fait que les placements classiques « préférés des Français » (livrets, fonds euros) devraient être durablement peu rentables du fait de la baisse des taux, alors que par ailleurs il apparaît de plus en plus nécessaire d’épargner sur le long terme. Mais, selon  Pierre Antraygues, directeur bancarisation épargne assurance de La Banque Postale, même lorsqu’ils ont un horizon de moyen et long terme (à 70 %), les Français investissent peu sur des produits risqués (seulement 35 %). Sans doute est-ce dû à leur objectif de transmission et à la concentration du patrimoine sur les plus de 60 ans. Les Français continuent à n’aller sur les marchés que lorsque le CAC augmente… Et de fait, leur expérience des 15 dernières années semble leur donner raison : entre 2000 et 2014, les fonds euros ont plus rapporté que les fonds en unité de compte (UC). Mais la baisse durable des taux va changer la donne.

Selon Bernard Spitz, président de la FFSA, il existe une batterie de produits et d’enveloppes pour faire investir les épargnants français dans des placements plus risqués : les contrats euro croissance dans lesquels les épargnants pourront retirer à tout moment leur épargne mais la garantie n’interviendra qu’à partir de 8 ans. Il est possible de transférer les contrats en euros classiques vers des contrats euro croissance pour conserver l’antériorité. 

D’ici un an, 70 % du marché des assureurs vie proposeront des contrats euro croissance. Les contrats vie génération (1/3 de solidaire en contrepartie d’un abattement de 20% supplémentaires sur les droits de succession)

Donner confiance dans l’entreprise

Pour Eric Alauzet, député du Doubs, la confiance vis à vis de l’entreprise émerge. La transparence est très importante. De même que le développement de l’ISR, qui permet de donner du sens.

Bernard Spitz s’est félicité de la part croissante des montants de l’assurance vie investis dans les entreprises : sur les 1220 milliards d’encours en 2014, 50,8 milliards sont investis dans des PME ETI (soit + 9 % par rapport à 2013)

Paul Perpère, délégué général de l’Association française des investisseurs pour la croissance (Afic), constate que le capital risque est moins développé en France qu’à l’étranger. Depuis la crise, les encours du capital investissement se sont stabilisés entre 6 et 7 milliards par an, alors qu’ils étaient supérieurs à 10 milliards d’euros avant la crise. Autant d’entreprises financées mais les « tickets » ont baissé.

Adrien Aumont, co-fondateur de KissKissBankBank, Hello merci et Lendopolis, a raconté son expérience et placé, avec beaucoup de vie et d’enthousiasme, le crowdfunding au centre de la réflexion sur le sens à donner à la finance. Même si la finance participative n’en est qu’à ses débuts, la projection pour 2020 à l’échelle mondiale est de 1000 milliards de dollars.

Pour Charles de Courson, député de la Marne, l’important est de se mettre d’accord sur les objectifs. Selon lui, il y en a trois principaux: favoriser l’épargne longue pour financer les entreprises, améliorer sa retraite et aider à la production de logements. Ce à quoi Jean Berthon, président de la Faider, a répondu en plaçant l’objectif d’amélioration de la retraite en tête des objectifs et en considérant que favoriser l’épargne longue était plutôt un effet.

Des propositions pour orienter l’épargne vers les entreprises

Plusieurs idées, dont certaines iconoclastes, ont été lancées pour orienter l’épargne vers les entreprises. Au nom de quoi le livret A est-il exonéré d’impôts alors qu’il est surtout utilisé par les personnes aisées? Plus on prend de risque plus on est taxé… Les plus-values devraient être mieux traitées qu’un revenu courant. Pourquoi la CSG/CRDS sur les revenus du capital a-t-elle un taux de 15,5 % alors qu’elle est de 8,5 % sur les revenus du travail? Ne faudrait-il pas revoir les aides au logement qui, depuis plusieurs années, ont boosté le prix des logements, ce qui en retour, rend le logement plus coûteux ? Comment utiliser le levier de l’épargne salariale ?