Le plan est organisé autour de cinq objectifs
Renforcer la supervision et la régulation des firmes financières
Diagnostic :
- le capital et les liquidités exigées pour couvrir les actifs et les prêts risqués des institutions financières sont insuffisants ;
- le système de régulation tient insuffisamment compte des risques que la défaillance d’un acteur de grande taille fait peser sur la stabilité d’ensemble du système financier ;
- la supervision des grands acteurs financiers est trop fragmentée ;
- les banques d’investissement sont trop peu contrôlées, les fonds spéculatifs (hedge funds) opèrent en dehors de toute supervision.
Réformes proposées :
- Créer un nouveau conseil de la supervision des services financiers présidé par le Secrétaire d’État au Trésor (l’équivalent d’un ministre fédéral de l’Économie et des Finances) pour identifier les risques systémiques qui pourraient apparaître et pour organiser la coopération entre les différents organismes de supervision et de contrôle.
- Renforcer le rôle de la Banque centrale(Fed) qui deviendra le superviseur des plus grandes institutions financières américaines quel que soit leur statut (banque, assurance, société de crédit, holding…).
- Renforcer les exigences en capitaux propres et en réserves prudentielles pour toutes les entreprises financières. Des normes plus élevées seront exigées des entreprises de grande taille.
- Instituer un enregistrement obligatoire auprès du régulateur des marchés financiers (SEC) des gérants de hedge funds et des autres fonds spéculatifs.
Établir une supervision complète des marchés financiers
Diagnostic :
- les innovations financières (notamment titrisation et produits dérivés) étaient supposées permettre une dispersion des risques, réduire les risques d’instabilité systémique et améliorer l’efficience des marchés et l’allocation des ressources. En réalité les procédés mis en œuvre, opaques et complexes, ont abouti fréquemment à une concentration des risques ;
- le manque de transparence a empêché les acheteurs des produits concernés par les innovations de comprendre pleinement la nature des risques qu’ils prenaient. Les agences de notation (lien avec le mot) en particulier n’ont pas su décrire correctement ces risques ;
- durant la crise, les dérivés de crédit (CDS) sont devenus une source majeure de contagion des risques au lieu de les disperser correctement.
Réformes proposées :
- Encadrer la titrisation. Les banques devront conserver au moins 5 % des crédits qu’elles titrisent. A noter qu’une mesure similaire vient d’être adoptée en Europe (pour plus d’informations, voir l’article à « Nouvelles réformes de la supervision financière en Europe ».
- Poursuivre les efforts de la SEC pour renforcer la régulation des agences de notation. Réduire autant que possible l’utilisation des natations des agences par les régulateurs et les superviseurs.
- Réguler les dérivés et notamment les dérivés de crédit (CDS).
- Améliorer le fonctionnement des systèmes de compensation, de règlement et de conservation des titres financiers associés aux marchés financiers et renforcer leur supervision.
Protéger les consommateurs et les investisseurs financiers contre les excès
Diagnostic :
- La régulation actuelle destinée à protéger les consommateurs et à favoriser la compréhension des produits financiers par le grand public s’est révélée inefficace, du fait notamment du manque de coordination entre les agences chargées de cette mission et de l’absence de régulation et de surveillance des crédits de type subprime.
Réformes proposées :
- Créer une nouvelle agence : la Consumer Financial Protection Agency. Celle-ci devrait notamment étudier avec attention les pratiques des courtiers en crédit hypothécaires (particulièrement leur laxisme dans la distribution de crédit) ainsi qu’élaborer des règles définissant ce que doivent être les informations mises à disposition du consommateur de produits financiers.
Renforcer la capacité de l’État à faire face efficacement à une crise
Diagnostic :
- Actuellement lorsqu’une entreprise financière bancaire ou non bancaire connaît de graves difficultés, elle a deux options : trouver du capital pour se renflouer ou faire faillite. L’expérience a montré que, s’agissant des institutions financières de très grande taille en détresse, ces deux options deviennent : être renfloué par des capitaux publics (cas de AIG) ou faire faillite (cas de Lehman Brothers). Ni l’une ni l’autre solution n’est satisfaisante.
Réformes proposées :
- Placer toutes les institutions dont la faillite mettrait en danger l’ensemble du système économique sous la surveillance d’un régulateur unique, la Banque centrale.
- Donner au gouvernement le pouvoir d’organiser la restructuration d’une entreprise financière de grande taille qui menacerait de s’écrouler.
Améliorer les normes internationales de régulation. Renforcer la coopération internationale
Diagnostic :
- alors que les crises financières se diffusent à une échelle internationale, les régulations sont encore largement nationales.
- Les entreprises ont de larges possibilités pour se localiser là où les normes de régulation sont les moins strictes et générer ainsi une course « au moins disant » réglementaire
Propositions :
- Les Etats-Unis qui s’efforcent de jouer un rôle de leadership dans les efforts de coordination des politiques financières au travers du G20 du Comité de Bâle ou du forum de la stabilité s’attacheront à promouvoir des initiatives de régulation internationales en ligne avec les réformes nationales préconisées dans ce plan.
Un plan ambitieux
Barack Obama a présenté ce plan comme la réforme la plus importante mise en œuvre depuis celle qui a suivi la crise de 1929. L’essentiel des dispositions proposées devra être approuvé par le Congrès (Parlement de l’État fédéral). Seules quelques dispositions pourront être prises par décrets de l’exécutif.
Mais trop limité ?
Citons parmi les premiers commentaires l’avis de deux récents prix Nobel d’économie, Paul Krugman et Edmund Phelps.
« Est-ce que le plan Obama fait ce qu’il faut ? » interroge Paul Krugman (New York Times, 19 juin 2009). Oui et non répond-il.
Oui, parce qu’il va mettre sous surveillance et faire sortir de l’ombre tous les établissements financiers y compris les banques fantômes d’hier.
Mais non parce qu’il ne se donne pas des moyens encore suffisants pour empêcher les excès et les dérives financières que pourtant il diagnostique comme étant la cause principale de la crise.
Selon Paul Krugman, l’obligation de conserver 5% des prêts titrisés est tout à fait insuffisante pour être efficace et le plan ne s’attaque pas vraiment à deux problèmes selon lui cruciaux, la réforme des agences de notation et le système de rémunération des banquiers.
Pour sa part, Edmund Phelps (Welt am Sonntag, 21 juin 2009) considère qu’il est certes raisonnable que le gouvernement veuille s’occuper des risques systémiques. Mais il juge illusoire de vouloir faire contrôler le système bancaire par la Réserve fédérale américaine. Lui aussi juge que la réforme du système des bonus versés aux dirigeants du secteur financier absente du plan est une affaire cruciale.
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