L’Insee a publié le 2 avril 2010 l’édition de son enquête sur les revenus et le patrimoine des ménages. Des études pleines d’informations et d’enseignements sont consacrées aux deux extrémités de l’échelle sociale.
Riches, très riches, et très très riches.
Julie Solard, de l’Insee, consacre son étude à l’analyse des très hauts revenus entre 2004 et 2007. Elle prend pour base les revenus déclarés annuel des ménages par unité de consommation. Elle distingue successivement : les 90 % du bas de l’échelle (la très grande majorité) A l’intérieur des 10 % de la population restante du haut de l’échelle les disparités sont considérables. Pour les faire apparaitre, l’Insee distingue les « personnes à très hauts revenus » c’est-à-dire les 1 % les plus riches qui sont elles-mêmes réparties en trois catégories :
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les plus aisés correspondent aux plus riches parmi les riches, les 1 pour 10 mille soit 5800 personnes ayant disposé des plus hauts revenus déclarés par unité de consommation.
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Les très aisés sont constitués par les 0,09 % suivants (52 200 personnes).
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Enfin les « aisés » correspondent aux 0,9 % les moins riches parmi les très hauts revenus..
Revenus d’entrée et revenu médian dans chaque catégorie
En 2007, le revenu médian par unité de consommation des ménages est de 17 644 € (soit un peu moins de 1 500 € par mois). On entre parmi les hauts revenus à partir d’un revenu de 35 677 € (près de 3 000 € par mois. Et le revenu médian des hauts revenus est de 44 262 € (3688 € par mois). On entre dans les aisés avec un revenu de 84 469 € annuels par unité de consommation (7 000 € par mois). Cette limite correspond par exemple à un couple de cadres supérieurs gagnant chacun 5 300 euros nets par mois ou à un ménage avec deux enfants, disposant d’un revenu déclaré de 15 000 euros nets par mois. Le revenu médian des aisés est de 107 663 € (près de 9 000 € par mois). La porte d’entrée des très aisés est à 225 767 € annuels (18 813€ par mois). Le revenu médian de la catégorie est de près de 300 000 € annuels. Enfin les 58 000 personnes ayant disposé des plus hauts revenus déclarés ont perçu au moins 687 862 € annuels (57 321 € par mois) soit 39 fois le revenu médian de l’ensemble des ménages. Mais cela a pu monter jusqu’à 13 millions d’€ (plus de 700 fois le revenu médian). La population des très hauts revenus est plus âgée et plus concentrée en région parisienne que le reste de la population.
Une part décroissante de revenus d’activité, une part croissante de revenus du capital
L’étude distingue trois source de revenus : les revenus d’activité (salaires, revenus des professions non salariés, pensions retraites…), les revenus du patrimoine et les revenus exceptionnels (levée d’options et plus-value). Sans surprise, l’étude constate que plus on monte dans la hiérarchie des revenus et plus la part des revenus d’activité est faible. Elle représente moins de 50 % des revenus totaux des plus aisés. Cela n’empêche pas qu’en moyenne les niveaux d’activité perçus par eux sont extrêmement élevés. Les revenus d’activité ou de remplacement moyen de l’ensemble de la population est de 38 000 euros. Ces revenus s’élèvent en moyenne à 178 000 euros pour les aisés, à 430 000 euros pour les très aisés et à 1 480 000 euros pour les plus aisés.
Les 10 % les plus riches perçoivent un quart des revenus d’activité déclarés, près de deux tiers des revenus du patrimoine et plus de quatre cinquième des revenus exceptionnels. Mais à eux seuls les très hauts revenus (1 % de la population les plus riches) perçoivent 5,5% des revenus d’activité, 32,4 % des revenus du patrimoine et 48,2 % des revenus exceptionnels déclarés.
Augmentation des inégalités par le très haut
Entre 2004 et 2007, le nombre de personnes riches est en forte augmentation. Le nombre des personnes gagnant plus de 100 000 euros constants par unité de consommation a crû de 28 %, celui dépassant le seuil de 500 000 euros a augmenté de 70 %.
L’explication est simple : ils ont obtenu des revenus d’activité en croissance plus rapide que le reste de la population et bénéficié beaucoup plus que les autres de la forte hausse durant cette période des revenus du capital et des revenus exceptionnels. Alors qu’entre 2004 et 2007, l’ensemble de la population voit ses revenus progresser de 9 % en moyenne, ceux des très aisés progressent de 20 % et ceux des plus aisés de 39 %. Les très aisés et les plus aisés, qui ne représentent que 0,1 % de la population, profitent de 4,6 % de la croissance des revenus déclarés.
Faible progressivité de l’impôt sur les revenus
La moyenne, sur les personnes à très hauts revenus, du taux d’imposition des revenus déclarés est de 20 %. « En appliquant le barème progressif de l’impôt sur le revenu, les revenus des plus aisés devraient donc en grande partie être imposés à 40 %», explique Julie Solard. « Pour les personnes très aisés et les personnes les plus aisées, le poids de l’imposition est de l’ordre de 25 % seulement. » Cette moyenne recouvre certes des inégalités de situation au sein même de cette catégorie : presque un quart des plus aisés a un taux d’imposition des revenus déclarés inférieur à 15 %, et plus d’un autre quart un taux d’imposition supérieur à 35 %. {Comme le souligne l’étude, « {Les réductions d’impôt et déductions fiscales contribuent à diminuer le taux moyen d’imposition.»}}
L’étude s’arrête en 2007. Elle ne dit pas comment la situation des riches et des plus riches a évolué dans l’absolu et relativement avec la crise. Mais elle montre que la France n’a pas été à l’écart de l’accroissement des inégalités par le très haut qui, selon certains économistes comme par exemple l’américain Paul Krugman, a constitué une des causes de la crise.
Dans cette même publication l’Insee analyse aussi l’évolution des situations de pauvreté.
Pour aller plus loin :L’étude de l’Insee sur les très hauts revenus entre 2004 et 2007