Objectif : uniformiser la réglementation bancaire au niveau européen
Jusqu’à présent, chaque pays membre de l’Union Européenne dispose de son propre système de supervision et de réglementation bancaire. En France par exemple, c’est l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP), autorité administrative indépendante adossée à la Banque de France, qui est en charge du contrôle et de la surveillance des établissements financiers (banques et assurances).
Or, les problèmes soulevés par la crise de la dette dans la zone euro ont rappelé à ses principaux dirigeants que le système bancaire européen est fortement intégré. Autrement dit, les difficultés d’une banque au niveau national s’étendent logiquement au niveau européen lorsque son poids économique est relativement important. D’où l’objectif du législateur européen d’uniformiser les règles et normes de supervision afin de prévenir les effets de contagion des défaillances du système bancaire d’un Etat au reste du territoire.
La mise en place d’une supervision bancaire unique constitue l’une des étapes de la construction d’une Union bancaire européenne, autrement appelé Mécanisme de supervision unique (MSU) qui repose sur trois autres piliers :
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Un système de garantie de dépôts unique
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Un système commun de gestion et de résolution des défaillances bancaires
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Un fonds commun de résolution des crises et de recapitalisation bancaire
Le MSU repose sur la BCE, même s’il n’est pas réservé aux membres de la zone euro. Par ailleurs, l’ABE garde son rôle de coordination des régulations nationales et d’édiction des normes européennes.
En savoir plus : notre dossier « 2012 : les réformes européennes du secteur bancaire et financier »
Le nouveau rôle de la BCE
Traditionnellement, la BCE a pour principal objectif de maintenir la stabilité des prix (maîtriser l’inflation) et de garantir l’efficacité du système financier. En mars 2014, date à laquelle le mécanisme sera opérationnel, la BCE sera entre autres chargée d’agréer les établissements de crédit et de s’assurer que ces derniers respectent les normes et règles prudentielles auxquelles ils sont assujettis. En cas de manquement, elle pourra également prononcer des sanctions et des mesures correctives à l’encontre des établissements financiers sous son contrôle.
Dans les faits, la BCE supervisera directement 150 à 200 groupes bancaires, soit « 1 000 banques sur les 6 000 que compte la zone euro », a précisé C.Noyer, gouverneur de la Banque de France : celles dépassant 30 milliards d’euros d’actifs, celles qui pèsent plus de 20 % du PIB de leur pays d’origine ou celles bénéficiant d’un programme d’aide européen. Ainsi, « sauf circonstances particulières », la BCE supervisera les trois banques les plus importantes de chaque Etat membre participant au mécanisme, a affirmé le ministre des finances Pierre Moscovici. Les autres resteront sous le contrôle des superviseurs nationaux. La BCE pourra néanmoins étendre son champ de contrôle à d’autres établissements si elle le juge nécessaire grâce à la mise en place d’un « droit d’évocation ».
Vers un système fédéral de supervision bancaire
Ce nouveau système ne scinde par la supervision bancaire en deux blocs puisque les superviseurs nationaux travailleront en étroite collaboration avec la BCE. Comme le précise C. Noyer, il ne s’agit pas d’un système dual mais fédéral :« ce n’est pas un système dans lequel il y a 200 banques (c’est-à-dire 200 groupes bancaires, ndlr) qui sont supervisées par la BCE toute seule et les autres qui restent supervisées au niveau national […] c’est un système fédéral […] c’est-à-dire que nous continuerons en France de nous occuper de toutes les banques françaises, y compris les plus grandes […] et nous enverrons des rapports réguliers à la BCE […]. Elle aura la capacité de donner des instructions sur la façon de superviser, sur les normes à retenir, et donc c’est elle qui fixera la doctrine pour l’ensemble du système bancaire ».
Un mécanisme non exclusif qui fait débat
Si ce mécanisme de supervision unique (MSU) n’est pas exclusivement réservé aux Etats membres de la zone euro, certains Etats comme la Suède, le Royaume-Uni ou encore la République Tchèque, ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils ne souhaitaient pas y participer à ce stade. Le premier considère que la simple création d’un comité de supervision ne suffira pas à régler la gestion des conflits d’intérêts entre Etats membres et non membres de la zone euro et que les nouveaux pouvoirs accordés à la BCE sont « excessifs ». Pour le second, se pose le problème du processus de décision à la majorité simple au sein de l’Autorité Bancaire Européenne (ABE). En effet, certains craignent que le bloc des Etats membres de la zone euro de par sa majorité numérique impose au reste de l’Union Européenne ses règles en matière de régulation financière. Ces derniers semblent avoir été entendus par le législateur européen. Désormais, pour adopter une décision contraignante, l’ABE devra obtenir une majorité simple au sein des deux groupes qui la composent : les Etats membres et non membres de la zone euro.
La création d’un comité de supervision pour éviter les conflits d’intérêt
Pour certains Etats, restait un problème de conflit d’intérêt lié au double statut de la BCE, à la fois en charge de la politique monétaire de la zone euro et désormais tenue au rôle de superviseur bancaire européen. Selon les textes de l’accord, ces deux fonctions seront « totalement différenciées » grâce à la création d’un comité de supervision dont les représentants seront à la fois issus de la BCE et des organes de supervision nationale. Pour en faciliter le fonctionnement, les décisions seront préparées par un comité de pilotage dont les représentants siègeront par rotation.
La création de ce comité permettra ainsi aux pays non membres de la zone euro de participer aux décisions et au fonctionnement du mécanisme de supervision unique. Cependant, les décisions prises dans l’enceinte de ce comité pourront uniquement être validées par le Conseil des gouverneurs, dont les représentants sont exclusivement issus des Etats membres de la zone euro. Dans ce contexte, le texte prévoit également la création d’un groupe de médiation afin de régler tout conflit dans l’éventualité d’une décision qui serait contestée par des pays n’appartenant pas à la zone euro.