Suite à la conférence nationale contre la pauvreté des 10 et 11 décembre 2012, le chef du gouvernement, Jean-Marc Ayrault, s’était engagé sur un ensemble de mesures destinées à la lutte contre la pauvreté et la précarité en constante progression en France depuis plusieurs années.
Ce plan pluriannuel, élaboré par un ensemble d’acteurs des politiques de solidarité (les services de l’État, les collectivités territoriales, les associations, les partenaires sociaux, les chercheurs et experts, ainsi que les personnes elles-mêmes concernées par la pauvreté), en constitue la principale feuille de route avec pour chaque mission un ministère identifié et un calendrier précisé : « Les mesures proposées dans le plan visent tout à la fois à répondre à l’urgence sociale du moment et à structurer la politique de solidarité du Gouvernement sur le long terme« , a précisé le Premier ministre. Un plan ambitieux qui se décline en trois objectifs :
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Réduire les inégalités et prévenir les ruptures ;
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Venir en aide et accompagner vers l’insertion ;
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Coordonner l’action sociale et valoriser ses acteurs.
Au total, près d’une cinquantaine de mesures sont présentées. Voici les principales :
Revalorisation du RSA socle de 10 % d’ici à 2017 et réforme du RSA activité
Afin que le RSA socle retrouve son niveau relatif d’origine (50 % du SMIC), le gouvernement s’engage à revaloriser de 10 % le montant forfaitaire du RSA socle, hors inflation, d’ici à 2017. Une hausse de 2 % devrait déjà être effective dès le 1er septembre 2013.
Le gouvernement s’engage également à réformer le RSA activité dont le taux de non recours s’élève aujourd’hui à 68 %. En parallèle, la prime pour l’emploi (PPE) devrait également être réformée : « faute de revalorisation, la PPE perd rapidement en efficacité et en capacité à effectivement soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs modestes ». Des voies d’amélioration de ces deux dispositifs devraient être examinées courant 2013 pour une application début 2014.
Hausse du plafond de la CMU complémentaire et de l’ACS
De façon à élargir la population cible, le gouvernement s’engage à relever le plafond de la Couverture Maladie Universelle (CMU) complémentaire et de l’aide à l’acquisition d’une couverture maladie complémentaire (ACS) de 7 % « en sus de l’inflation ». Ainsi, ce sont 750 000 personnes supplémentaires qui pourront bénéficier d’un de ces deux dispositifs.
Prévention des difficultés financières des ménages modestes
Dans l’optique de prévenir les difficultés financières des ménages modestes, différentes mesures ont été retenues par le gouvernement visant notamment à lutter contre le surendettement et à favoriser l’inclusion bancaire. Ce qui passe par la mise en place d’un dispositif de prévention du surendettement par les établissements bancaires. Ces derniers devront désormais proposer à des personnes en situation de fragilité financière la gamme des paiements alternatifs (GPA), plafonner les frais prélevés en cas d’irrégularité du fonctionnement du compte pour cette catégorie de personnes, et faciliter la procédure du droit au compte.Voir la loi de séparation et de régulation des activités bancaires.
Le droit au compte
« Toute personne physique ou morale domiciliée en France, dépourvue d’un compte de dépôt, a droit à l’ouverture d’un tel compte dans l’établissement de crédit de son choix. » (Article L312-1 du Code Monétaire et Financier)
D’autres mesures poursuivent la même finalité:
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Mise en place d’un registre national des crédits à la consommation (dit « fichier positif »). Actuellement, seuls les incidents de remboursement des crédits sont enregistrés au FICP, fichier géré par la Banque de France ;
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Création d’un observatoire de l’inclusion bancaire pour permettre le suivi des pratiques bancaires à l’égard des populations les plus fragiles ;
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Développement d’un réseau de « points conseils budget » pour assurer un accompagnement des personnes en difficultés financières (conseils, orientations vers des structures adaptées, médiation avec les créanciers…). Ces points conseils budget devraient être mis en place début 2014. D’ici là un groupe de travail doit établir une cartographie des initiatives existantes et faire des recommandations opérationnelles. En parallèle, le plan affirme la nécessité de « promouvoir à l’échelle nationale l’éducation budgétaire et l’apprentissage des outils bancaires afin de diffuser les connaissances minimales permettant à toute personne d’utiliser au mieux un compte bancaire, des moyens de paiement et des crédits. » On ne saurait mieux exprimer l’importance de l’éducation budgétaire et financière. A cette fin, un groupe de travail sera prochainement installé sous l’égide du CCSF en liaison avec le ministère de l’éducation nationale.
Renforcement de l’aide aux familles les plus touchées par la pauvreté
Cette mesure s’inscrit dans la volonté du gouvernement de« lancer une réflexion portant sur l’architecture des prestations familiales dans une optique de redistribution au profit des familles pauvres ».L’objectif du gouvernement est de « redéployer » les prestations sociales vers les familles monoparentales et les familles nombreuses particulièrement touchées par la pauvreté (leur taux de pauvreté est respectivement de 22,7 % et 32,2 %). Dans cette optique, le gouvernement s’engage à augmenter le montant de l’allocation de soutien familial (ASF) et à majorer le complément familial (CF).
Le texte précise également qu’une action particulière sera menée pour enrayer le phénomène des pensions alimentaires impayées qui représentent aujourd’hui environ 20 % du revenu des familles monoparentales pauvres : « il en résulte une fragilisation des femmes seules, qui peuvent facilement tomber dans la précarité ».
Enfin, pour favoriser l’égalité des chances des enfants issus de familles vulnérables et améliorer l’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle, « l’État recherchera les moyens de garantir un accueil en structure collective des enfants vivant sous le seuil de pauvreté ». À terme, ils devront représenter au moins 10 % de l’ensemble des enfants accueillis dans ce type de structure.
Amélioration des conditions d’accès au travail pour les plus vulnérables
« En partant du principe que « nul n’est inemployable », l’objectif est de favoriser les parcours permettant l’accès à l’emploi, même pour les plus en difficultés ».
Dans cette optique, le gouvernement s’engage à allonger la durée des nouveaux contrats aidés (dès le premier semestre 2013) et à mettre en place une « garantie jeune ». Elle vise à inscrire 100 000 jeunes, qui ne sont « ni à l’école, ni en formation, ni en emploi et en situation de grande précarité »,dans un parcours contractualisé d’accès à l’emploi ou à la formation. Concrètement, le service public sera en charge de proposer des formations ou emplois adaptées en fonction du profil des intéressés, qui, sous condition d’acceptation, pourront bénéficier d’une allocation d’un montant équivalent au RSA. Une phase test de ce dispositif sera lancée dans 10 territoires pilotes en septembre prochain, avant d’être généralisée.
L’amélioration des conditions d’accès au travail pour les plus vulnérables comprend d’autres mesures telles que l’expérimentation de parcours d’insertion dans des emplois d’avenir ou encore la réinsertion professionnelle de personnes sous main de justice ou en situation d’handicap.
Développement d’une offre de logement adaptée
De façon à développer l’offre de logements sociaux, la loi relative à la mobilisation du foncier public votée au Parlement fait passer de 20 à 25 % la proportion de logements sociaux obligatoires dans les communes de plus de 3500 habitants (1500 en Île-de-France). 5000 logements d’hébergement d’urgence seront également créés dès 2013 pour« mettre fin à la gestion au thermomètre de l’hébergement d’urgence ».
La construction de 150 000 logements locatifs sociaux par an, la rénovation énergétique de 500 000 logements, un programme de logements à bas niveau de loyer et de soutien à la construction de logement adaptés (résidences sociales et d’accueil) devraient également être mis en place par le gouvernement au cours du quinquennat.
Refondation du travail social
Le plan prévoit un volet formation des travailleurs sociaux important auquel La Finance pour tous est particulièrement attaché (voir la contribution de l’IEFP aux travaux du groupe de travail Soulage). Il s’agit de moderniser l’appareil de formation initiale et de développer la formation continue, notamment sur les questions budgétaires et bancaires.