La grande conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012 a défini un calendrier en trois phases pour une réforme globale de notre système de retraite. Dans le cadre de la phase 1, un état des lieux du système de retraite français et de ses perspectives financières a été demandé au COR. Le rapport que celui-ci a publié le 23 janvier 2013 « Retraites : un état des lieux du système français », ainsi que le précédent rapport adopté en décembre 2012 (« Retraites : perspectives 2020, 2040 et 2060 »), répondent à cette demande.Sur la base de ce travail de diagnostic, une commission ad hoc va formuler différentes pistes de réformes. Elle sera suivie à partir du printemps 2013 d’une phase de concertation au cours de laquelle le gouvernement échangera avec les partenaires sociaux sur les orientations qu’il souhaite retenir.
Des inégalités dans différents domaines
Le rapport du COR pose la question de savoir si le système de retraites français est ou non un système équitable. Différentes questions sont successivement abordées : l’équité entre les générations, entre les femmes et les hommes, vis-à-vis des personnes en situation de handicap ou de pénibilité ou encore vis-à-vis des assurés polypensionnés.
Le système de retraites français est un système contributif : les niveaux de la retraite sont proportionnels au montant des cotisations versées par les assurés et leurs employeurs. Les disparités entre les retraités reflètent donc celles des carrières professionnelles des salariés. Mais des mécanismes de solidarités multiples ont été introduits, liés aux situations familiales, au handicap, à la pénibilité du travail, aux accidents de la vie professionnelle, à la pauvreté, etc. Ces mécanismes remplissent-ils correctement leurs fonctions ? Les règles de fonctionnement du système contributif (durée de cotisations, calcul du salaire de référence, etc.) sont-elles neutres ou aggravent-elles les inégalités ?
Équité entre générations ?
Pour évaluer l’équité entre générations (c’est-à-dire entre les actifs d’aujourd’hui qui financent les retraites d’aujourd’hui et les retraités d’aujourd’hui qui ont cotisé hier), le rapport identifie quatre dimensions de la retraite du point de vue de l’assuré : la durée de retraite, la durée d’activité, le taux de prélèvement sur les actifs au moment où la génération est en activité et le niveau des pensions mesuré par le taux de remplacement. Conclusion du COR : actuellement, l’équité entre générations semble assez bien respectée : « ll n’existe pas de générations qui seraient avantagées (ou désavantagées) au regard de l’ensemble des quatre dimensions ».Ainsi par exemple les générations les plus jeunes devraient bénéficier d’une durée espérée de retraite plus longue, mais avec un taux de prélèvement moyen plus élevé, alors que les générations plus anciennes ont bénéficié de prélèvements plus faibles mais percevraient leur retraite pendant une durée en moyenne plus courte. Attention cependant, avertit le COR, aux mesures qui devront être prises en vue de revenir à l’équilibre financier du système et qui pourraient modifier cette situation.
Équité au sein d’une même génération ?
Le rapport étudie plus particulièrement la situation des polypensionnés, la situation respective des femmes et des hommes, les questions de la prise en compte de la pénibilité, du handicap et de l’inaptitude. Il met en relief certaines difficultés qui concernent souvent des règles de fonctionnement du système contributif et certains dispositifs de solidarité :
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les retraités polypensionnés sont le plus souvent pénalisés, notamment les salariés passés du secteur privé au secteur public, mais certains, en plus petit nombre, sont favorisés ;
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les dispositifs de solidarité réduisent globalement les inégalités au profit des femmes mais certains droits apparaissent mal ciblés comme la majoration pour les parents de trois enfants qui bénéficie surtout aux retraités aisés et aux hommes. D’autre part, la compensation insuffisante des interruptions de carrière et les modalités de validation de trimestres qui défavorisent les carrières précaires et mal rémunérées pénalisent davantage les femmes que les hommes ;
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les effets de la pénibilité du travail sur la durée de vie des retraités continuent d’être mal pris en compte ;
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plus généralement, les règles concernant la durée de carrière pénalisent les personnes entrées très tardivement ou, au contraire, entrées de manière précoce dans la vie active.
Quelques pistes de réformes
Sur la base de cette analyse, le Cor, qui n’avait pas pour mandat de formuler des propositions de réforme, suggère néanmoins quelques pistes de travail. Il propose notamment de reconsidérer la règle des 200 heures au SMIC horaire pour valider un trimestre et d’étudier des alternatives à la prise en compte des 25 meilleures années pour le calcul du salaire de référence. L’exclusion des plus mauvaises années du calcul du salaire de référence, voire la prise en compte de l’intégralité des salaires de la carrière pourraient ainsi être envisagées.
Pas de remise à plat d’ensemble
Le rapport ne traite pas des inégalités entre les actifs de différents statuts (entre salariés et non-salariés, entre salariés du privé et fonctionnaires et assimilés). Mais il donne cependant quelques repères utiles illustrant le rapprochement des règles de fonctionnement des régimes. Il souligne également que le taux de remplacement ne semble pas très différent entre salariés du public et salariés du privé, a contrario de quelques idées reçues sur les privilèges supposés du régime de retraite des fonctionnaires.
Plus globalement, le rapport ne débouche pas sur l’idée d’un besoin de remise à plat du système de retraite français ou de son unification complète en un seul régime fonctionnant en annuités, en points ou en compte notionnel. Les éléments du débat sur cette question ont été produits par le COR dans un précédent rapport en janvier 2010. Ils pourraient cependant resurgir dans l’élaboration de nouvelles réformes et la concertation qui va maintenant s’ouvrir entre pouvoirs publics et partenaires sociaux sur la base des rapports du COR.