Jusque-là les études sur le marché de l’immobilier répondaient souvent à la question : « Qui a acheté un bien immobilier ? ». Une nouvelle approche, plus sociologique, développée par le Crédit foncier et trois chercheurs en sociologie du logement (Paris Dauphine), Kevin Beaubrun-Diant, François Cusin et Claire Juillard, propose de répondre à la question : « Qui peut acheter ? ». Un bémol : l’indicateur Capacim (CAPacité d’Achat Immobilier) ne s’intéresse qu’à l’achat de bien immobilier ancien.
Une amélioration du pouvoir d’achat en Ile de France
Les résultats sont parfois surprenants. C’est ainsi qu’il permet de montrer que plus de 38 000 franciliens n’ont pas pu réaliser leur projet d’achat d’un logement au troisième trimestre 2012. Hausse du prix de l’immobilier ? Pas seulement, car cet indicateur montre que la seule hausse du prix de l’ancien, toutes choses égales par ailleurs, aurait exclu plus de 110 000 ménages franciliens sur la même période.
Alors, amélioration du pouvoir d’achat en Ile de France ? Il semble que oui parce qu’il faut tenir compte de la solvabilité des ménages. Cette capacité à acheter dépend de plusieurs facteurs comme le niveau des taux d’intérêts des crédits à l’habitat, les perspectives d’emplois, le dynamisme régional, les frais de notaire, l’évolution des revenus mais aussi l’épargne des ménages.
Les résultats de ce baromètre permettent ainsi d’observer :
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Des différences importantes selon les communes d’Ile de France : une certaine hétérogénéité avec des villes où les pouvoirs d’achat immobilier sont relativement élevés (2 ménages sur 3 peuvent réaliser leur projet immobilier), comme à Evry, Argenteuil, Cergy, et d’autres où les pouvoirs d’achat sont faibles (moins d’un ménage sur deux) comme à Boulogne Billancourt, Issy les Moulineaux, Vincennes.
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De fortes disparités à corréler avec le dynamisme des régions : ainsi, Marseille se distingue par un pouvoir d’achat immobilier faible (seule, une personne sur deux peut réaliser son projet immobilier) et en régression sur le troisième trimestre 2012. A l’inverse certaines villes comme Lyon, Bordeaux ou Nantes offrent un pouvoir d’achat immobilier élevé et relativement stable ou en progression.
Lecture du graphique : A Bordeaux, 65 % des ménages ont pu réaliser leur projet immobilier sur le troisième trimestre 2012. A Marseille, moins d’un ménage sur deux a pu acheter un logement dans de l’ancien à sa taille.
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Des écarts de pouvoir d’achat selon les catégories socioprofessionnelles. Au troisième trimestre 2012, les ouvriers et employés, mais aussi dans une moindre mesure les cadres et retraités ont leur pouvoir d’achat immobilier reculer alors que celui des artisans-commerçants et professions libérales reste stable.
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Des situations familiales facteurs de vulnérabilité : sans surprise, les ménages dont le pouvoir d’achat immobilier est le plus élevé sont les couples actifs sans enfants. Ils réunissent en général toutes les conditions pour obtenir un prêt à des conditions avantageuses et ne pas être arrêtés par l’obstacle du prix de l’immobilier. A l’inverse, seules 16 % des familles monoparentales à Paris sont en mesure d’acheter un logement. Pour ces familles, l’obtention d’un crédit immobilier est souvent contrainte par l’absence d’apport personnel et de double revenu. Mais ce baromètre montre aussi que les familles avec enfants ont des difficultés à trouver un logement à leur taille. Le palmarès revient comme toujours à Paris où seule une famille sur cinq, au troisième trimestre 2012, a pu acquérir un logement adéquat.
Il faut noter que cet indicateur s’inscrit dans un réel souci de compréhension des comportements des ménages vis-à-vis du logement. Déjà en 2006, Kévin Beaubrun-Briant, François Cusin et Claire Juillard avaient lancé une étude sur le logement. A l’époque, les conclusions de ces travaux avaient produit un électrochoc puisqu’ils affirmaient la nécessité de construire 500 000 logements par an afin d’anticiper la demande future. Ces chercheurs avaient poursuivi en publiant un rapport sur l’attractivité des territoires. Ils posaient la question du dynamisme des régions et de son impact sur la mobilité territoriale des populations. La dernière étape de leurs études sur le logement est donc la mise en place et l’utilisation de cet indicateur Capacim qui permet de mieux comprendre le comportement des ménages dans leur acquisition d’un logement. Affaire à suivre… chaque trimestre !