La loi Lagarde, portant réforme du crédit à la consommation, a libéralisé le recours à la délégation d’assurance. Elle permet à l’emprunteur de choisir librement l’assurance de son prêt immobilier, notamment en s’adressant à un assureur autre que celui de la banque prêteuse. L’objectif de la loi était d’ouvrir ce secteur à la concurrence et de faire baisser les prix. Pour évaluer l’efficacité, ou non de ce dispositif, l’UFC-Que Choisir a réalisé une étude sur la base d’un appel à témoignages lancé sur le site de l’association du 26 juin au 26 août 2013 : 105 réponses ont été reçues. Ce qui constitue au mieux un éclairage pratique sur la mise en œuvre de cette mesure.
Le dispositif de la loi Lagarde
Depuis le 1er septembre 2010, il est interdit aux banques d’imposer leur propre contrat d’assurance emprunteur (dit assurance de groupe). L’emprunteur peut souscrire un contrat individuel auprès de l’assureur de son choix. La banque ne peut pas refuser cette offre dès lors qu’elle présente des garanties équivalentes à celles de son contrat de groupe. Elle doit motiver une éventuelle décision de refus. Et la loi interdit à la banque de modifier le taux du prêt proposé initialement.
Des effets insuffisants
Trois ans après l’entrée en vigueur de ces dispositions, l’UFC-Que Choisir dresse un bilan assez négatif de leur impact sur le marché de l’assurance emprunteur.
Le marché de l’assurance emprunteur des crédits immobiliers est détenu essentiellement par des sociétés d’assurances filiales de groupes bancaires : trois d’entre elles représentent plus de la moitié des cotisations versées. La part des assurances souscrites par délégation a diminué depuis 5 ans, malgré la loi Lagarde, passant de 20 % des ventes en 2009 à 14 % en 2011. Enfin, le coût de l’assurance emprunteur n’a pas diminué depuis l’entrée en vigueur de la loi Lagarde. Il a même légèrement augmenté en 2010 et 2011. L’assurance emprunteur représente environ 25 % du coût total du crédit immobilier en 2013, contre 19 % en 2008.
Les principales difficultés rencontrées par les emprunteurs
Plusieurs mesures du dispositif mis en place par la loi ne sont pas respectées par les banques lors d’une demande de délégation d’assurance par l’emprunteur.
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Allongement des délais d’examen des demandes de délégation : la banque bloque la délégation d’assurance, l’emprunteur se trouvant contraint d’accepter l’assurance de la banque lorsque s’approche la date limite de la vente immobilière.
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Multiplication des refus pour défaut d’équivalence des garanties : la banque peut refuser la délégation si la couverture de l’assurance individuelle n’est pas équivalente à celle du contrat de groupe de la banque.
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Multiplication des frais : malgré les dispositions légales, la banque augmente le taux du crédit en cas de délégation d’assurance. Ou la banque facture des frais de délégation de montants élevés.
De telles pratiques dissuadent ou empêchent les emprunteurs de faire jouer la concurrence. L’association de consommateurs dénonce également le « conflit d’intérêt » des banques en matière d’assurance emprunteur, qui sont toute à la fois juge (peut refuser l’assurance déléguée) et partie (la banque a intérêt à commercialiser son propre contrat d’assurance emprunteur).
L’UFC-Que Choisir se prononce pour le droit à résiliation annuelle
Dans le cadre du projet de loi sur la consommation de Benoît Hamon, ministre de la Consommation, discuté devant le parlement cet automne, l’association demande la création d’un droit à résiliation annuelle de l’assurance emprunteur. Selon les termes de son communiqué de presse, « ce droit à résiliation annuelle (…) neutraliserait le problème des délais qui empêchent aujourd’hui toute concurrence réelle : les délais de souscription passés, les banques ne pourraient plus effectuer de blocages à la délégation. De même, le crédit étant déjà en cours, son taux ne pourrait plus être revu à la hausse. »
Les nouveautés de la réforme bancaire pour l’assurance emprunteur
La loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 apporte quelques améliorations au dispositif de délégation d’assurance de prêt. Lorsque l’emprunteur propose à la banque prêteuse un contrat d’assurance par délégation, celle-ci doit lui faire part de sa décision d’acceptation ou de refus de l’assurance dans un délai de 10 jours ouvrés à compter de la réception de la demande de substitution. Si le prêteur accepte en garantie un contrat d’assurance d’un assureur autre que celui de son assurance de groupe, il ne pourra plus exiger le paiement de frais supplémentaires, pour analyse du contrat d’assurance déléguée. Il ne pourra également pas modifier les conditions du prêt ni modifier le taux d’intérêt du crédit.Ces dispositions entreront en vigueur à compter du 27 janvier 2014.
« Réforme bancaire : le consommateur mieux protégé » – Actualité du 24/07/2013