Cinq ans après le G20 de Washington, où en est-on de la régulation financière
Animée par Philippe Mudry, directeur général de l’Agefi, cette table ronde a permis de confronter les points de vue du régulateur français (Gérard Rameix, président de l’AMF), du régulateur européen (Steven Maijoor, président de l’ESMA), des professionnels (Frédéric Janbon président de l’AFME – Association for financial markets in Europe) et de la Banque mondiale (Bertrand Badré, directeur général et directeur financier pour le groupe Banque mondiale).
La réforme n’est pas terminée
Les intervenants se sont accordés sur le fait que la régulation a bien avancé et que les chantiers entamés à la suite de la crise de 2007/2008 sont pour la plupart en bonne voie, mais que la réforme n’est pas terminée. Nous sommes à une période charnière, idée que chacun des panelistes a exprimée à sa manière. Pour Monsieur Maijoor, les avancées en matière de régulation doivent désormais être mises en oeuvre et supervisées. Elles doivent également être complétées par le volet « protection du consommateur ». Monsieur Janbon a relevé un certain nombre de points techniques qui lui paraissent devoir être corrigés (réforme du marché des dérivés de gré à gré ou ratio de liquidité des banques). Monsieur Rameix a, lui, fait remarquer que l’équilibre actuel, basé sur des taux d’intérêt très bas et des interventions massives de la FED our acheter de la dette publique américaine, ne pouvait pas durer. Il a également insisté sur la nécessité de faire en sorte que le financement de l’économie – qui a besoin de financement de long terme – soit satisfaisant. Pour cela, il faut à la fois créer des outils adéquats– et dans ce contexte, la titrisation est utile et il faut réfléchir à la relancer, et donner confiance aux épargnants pour qu’ils investissent à long terme. Monsieur Badré a insisté sur la nécessité d’intégrer les pays émergents dans la réflexion sur le rôle de la finance, car si les pays émergents n’arrivent pas à financer leurs projets (d’infrastructure par exemple), c’est toute la croissance mondiale qui en pâtira.
Comment concilier le financement de l’économie et l’intérêt des épargnants
Animée par Benoît de Juvigny, secrétaire général de l’AMF, cette table ronde réunissait Karine Berger, députée, Pierre Gattaz, président du Medef, Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), Michel Lucas, président du groupe Crédit Mutuel CIC et Joseph Thouvenel, vice-président de la CFTC et membre de la commission des sanctions de l’AMF.
Tous les panelistes sont tombés d’accord sur le fait que la finance doit résoudre une équation difficile pour réconcilier les épargnants, qui investissent plus que jamais dans des produits sans risque, y compris les gros patrimoines qui placent plusieurs millions dans des assurances vie investies en fonds euros, et les entreprises qui ont besoin de ressources longues. Mais tous n’avaient pas nécessairement la même opinion sur la meilleure façon d’y parvenir. La question de l’impact très négatif du changement des règles fiscales – et en particulier rétroactives – a été largement évoquée. De même, le poids de la fiscalité a fait l’objet d’un débat entre, notamment, Pierre Gattaz qui estime que les entreprises et les épargnants font l’objet d’un matraquage fiscal et Karine Berger qui a fait valoir que la France va devenir le pays où le rapport Impôt sur les sociétés/valeur ajoutée va devenir le plus faible. Jean-Pierre Jouyet a rappelé le rôle essentiel de la Caisse des dépôts comme investisseur de long terme, directement ou au travers du Fonds d’épargne ou de la Banque Publique d’Investissement. Pour réconcilier les points de vue, l’épargne salariale comme l’économie sociale et solidaire ont été jugées aptes à redonner confiance dans la finance, tout comme l’éducation financière et la formation en économie.