Parmi ces mesures figurait la décision de conduire, sur une période de deux ans, des opérations ciblées de refinancement à plus long terme (targeted longer-term refinancing operations, ou TLTRO) ayant pour but de renforcer l’activité de prêts bancaires au secteur privé non financier de la zone euro, à l’exclusion des prêts au logement.
Cette facilité est offerte aux banques de la zone euro à des conditions très favorables puisque le taux d’intérêt accordé par la BCE est calculé à partir du taux de ses opérations principales de refinancement (0,1 % depuis le 5 septembre) majoré de 10 points de base, soit 0,2 %.
Plusieurs tranches de ce programme TLTRO ont été actées :
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septembre et décembre 2014 pour les facilités initiales qui pourront atteindre 400 milliards d’euros,
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puis des montants complémentaires qui s’échelonneront sur un rythme trimestriel de mars 2015 à juin 2016.
Quel est l’objectif recherché par la BCE à travers cette opération ?
L’objectif de la politique monétaire conduite actuellement par la BCE est de faire repartir la distribution du crédit bancaire en zone euro, lequel s’inscrit en reflux quasi permanent depuis début 2009. Les TLTRO ont été décidés parce que la politique monétaire « conventionnelle », qui passe par la fixation des taux d’intérêt directeurs, s’est jusqu’à présent révélée inefficace pour stimuler la distribution de prêts bancaires aux entreprises de la zone euro.
La BCE n’ a pas d’autre choix que de passer par l’intermédiaire des banques commerciales pour tenter d’influencer l’activité économique. En zone euro en effet, l’essentiel du financement de l’économie est assurée par les banques, contrairement aux Etats-Unis où le financement par les marchés de capitaux est beaucoup plus développé.
La politique monétaire de la BCE est ainsi tourné exclusivement vers les banques : c’est en impactant les conditions de leur refinancement auprès d’elle que la BCE détermine le niveau des taux d’intérêt auxquels les banques prêteront à leur tour à leurs clients. La BCE agit ainsi indirectement sur l’activité économique, via les taux d’intérêt.
Par ailleurs ses statuts ne lui permettent pas de financer directement le déficit budgétaire des pays membres de la zone euro en leur accordant des crédits (ce que l’on dénomme par le terme « faire tourner la planche à billets »).
Moins de succès que prévu
La première tranche du programme des TLTRO a été mise en œuvre jeudi 18 septembre 2014.
Si 255 banques sur 382 y ont participé, elles n’ont demandé des refinancements qu’à hauteur de 83 milliards d’euros, soit moins du quart de l’enveloppe totale que la BCE propose pour 2014. Alors que cette dernière espérait que les banques demanderaient au moins pour 100 milliards d’euros de refinancements.
Le montant finalement alloué par la BCE est d’autant plus décevant que certaines banques pourraient avoir participé à l’opération, non pas pour obtenir des liquidités afin d’accorder des crédits aux entreprises, mais pour neutraliser l’impact des remboursements de prêts obtenus dans le cadre d’un précédent programme de la BCE lancé en 2011, le LTRO, et qui arrive à échéance.
Le semi-échec de la première tranche du programme TLTRO tient à la conjugaison de deux éléments :
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D’une part, pour des raisons réglementaires, les banques ne peuvent accorder des crédits que si leurs fonds propres sont suffisants pour couvrir le risque de perte en cas de défaillance de l’emprunteur. Dans plusieurs pays de la zone euro (et plus particulièrement dans les pays dits « périphériques », c’est à dire au Portugal, en Espagne, en Grèce et en Italie), les banques souffrent d’un manque de fonds propres. Or, c’est justement dans ces pays que les concours aux ménages et aux entreprises ont diminué le plus et où les besoins de relance du crédit sont les plus criants.
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D’autre part, le calendrier de la première tranche des TLTRO n’était pas optimal. La BCE procède actuellement, dans le cadre de la mise en place du Mécanisme de Supervision Unique, à une revue de la qualité des actifs des banques de la zone euro et à des « stress tests » destinés à s’assurer de la solidité du système bancaire européen. Or, pour les établissements dont les tests révèleront des risques trop importants par rapport aux fonds propres, des sanctions seront prises ou des obligations de recapitalisation seront exigées. Cet élément est de nature à retarder la prise de risque de la part des banques, les incitant à attendre la fin des stress tests avant de revoir leur politique de distribution de crédit.
Les stress-tests menés par la BCE devraient s’achever en novembre prochain, avant que n’arrive la seconde tranche de la facilité initiale des TLTRO en décembre. C’est donc à ce moment qu’il sera véritablement possible d’effectuer le bilan de cette opération.