La loi du 8 août 2016 « relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels », portée par la ministre du travail, Myriam El Khomri, vient d’être publiée au Journal officiel au lendemain de sa promulgation, permettant son entrée en application.
Le projet de loi avait fait l’objet de deux saisines du Conseil constitutionnel, par les députés et par les sénateurs. Le Conseil Constitutionnel a partiellement censuré le texte de la loi travail (décision n°2016-736 DC du 4 août 2016) sur cinq mesures secondaires, deux portant sur le fond (relatives au dialogue social dans les entreprises franchisées et aux locaux syndicaux) et trois sur la forme. Les autres articles de la loi ont été validés par le Conseil Constitutionnel.
Le temps et la rémunération du travail
La durée légale du travail reste de 35 heures par semaine. La durée maximale du travail reste fixée à 10 heures par jour et à 48 heures par semaine. Ces durées peuvent toujours être portées à 12 heures par jour et à 60 heures par semaine en cas de « circonstances exceptionnelles », Dorénavant, c’est l’accord d’entreprise qui prime sur l’accord de branche, avec le maintien de l’autorisation de l’inspection du travail.
Les entreprises de moins de 50 salariés pourront librement proposer à leurs salariés un forfait jour, dérogeant aux règles des 35 heures. Ces derniers sont tout aussi libres, en droit, de refuser la proposition.
Concernant la rémunération du temps de travail, en principe, les heures supplémentaires sont majorées de 25 % pour les 8 premières et de 50 % pour les suivantes. Il était déjà possible de réduire cette majoration à 10 % à condition qu’aucun accord de branche ne s’y soit opposé. La loi nouvelle retire cette dernière condition et permet de réduire à 10 % la majoration des heures supplémentaires à partir de l’accord de l’entreprise.
Licenciements et indemnités
La loi nouvelle différencie les critères du licenciement pour « difficultés économiques » selon la taille de l’entreprise. Un barème est institué qui met en relation la baisse du chiffre d’affaires avec la taille de l’entreprise : plus sa taille est grande, plus le chiffre d’affaires doit avoir baissé depuis longtemps pour qu’un licenciement économique pour difficultés économiques soit justifié.
Si le licenciement n’est pas justifié – que ce licenciement ait été fait pour des motifs économiques ou personnels – le salarié a droit à des indemnités. Il doit saisir le conseil des prud’hommes pour les obtenir. La loi intègre dans le Code du travail le principe de plafonnement des indemnités prud’homales, selon un barème qui se fonde sur l’ancienneté du salarié. Mais ce barème n’a pas force impérative dans le texte définitivement adopté : le plafond ne sert qu’à titre indicatif et ne lie pas les conseillers prudhommaux dans leur décision.
La négociation collective
La loi nouvelle intègre, dans son article 2, un principe directeur qui en donne la philosophie : l’idée est de privilégier les accords d’entreprise sur les accords de branche, qu’ils aient des termes plus favorables pour les salariés ou qu’ils ne les aient pas. Cette « inversion de la hiérarchie des normes », que l’article 2 dispose, a été très critiquée par les opposants du texte.
Plus concrètement, la loi prévoit un nouveau type d’accord d’entreprise : l’accord de développement de l’emploi (dit aussi accord offensif, en opposition avec l’accord défensif de maintien de l’emploi qui existait déjà). Cet accord permet à l’employeur de faire travailler davantage les salariés pendant 2 ans, si les nouveaux besoins en activités le justifient. Un salarié refusant une telle augmentation de temps de travail pourra être licencié pour motifs économiques
La loi introduit à ce sujet deux changements majeurs. D’abord, la part de la représentation syndicale nécessaire pour valider un accord d’entreprise passe de 30 % à 50 %. Il faut donc nécessairement des syndicats représentant la moitié ou plus des salariés pour que l’accord négocié ait force obligatoire. Ensuite, la loi ajoute la possibilité de contourner une absence de majorité syndicale : un syndicat représentant moins de 30% des salariés peut demander à ce que l’accord d’entreprise soit soumis à un référendum. Si plus de la moitié des salariés accepte l’accord, alors celui-ci est valide, les syndicats majoritaires n’ayant pas de faculté d’opposition.
D’autres mesures
Un nouveau compte personnel d’activité (CPA), permettra un suivi individuel de tous les actifs, quel que soit leur statut, du début de leur activité professionnelle jusqu’à leur décès. Il intègrera le compte personnel de formation, le compte pénibilité et un nouveau compte d’engagement citoyen (qui permettra de gagner des heures de formation en cas de volontariat et d’activité bénévole).
La visite médicale d’embauche, actuellement systématique, ne concernera plus désormais que les salariés exposés à des risques particuliers. Au moment de l’embauche, les autres auront une visite d’information et de prévention.
Enfin, la Garantie Jeunes sera généralisée à l’ensemble du territoire en 2017. Actuellement, ce dispositif est mis en œuvre dans 91 départements. Elle concerne les individus de 18 à 25 qui sont en situation de décrochage. Ce dispositif leur propose d’être accompagnés par une mission locale pour trouver un emploi tout en touchant une aide mensuelle. La loi change également la façon d’obtenir cette garantie : il fallait autrefois passer par une commission ; demain le fait de remplir un certain nombre de critères sera suffisant.