Septennat de VGE : les chocs pétroliers, la stagflation et les mesures d’austérité
En 1974, année de l’élection de Valéry Giscard d’Estaing, la France commence à subir le contre-coup du premier choc pétrolier de 1973. Ce dernier marque la fin de la période dite des « 30 Glorieuses », selon l’expression de Jean Fourastié. La fin de la Seconde Guerre avait, en effet, ouvert une ère de croissance inédite dans l’histoire française. Selon les données de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) atteint 5,4 % en moyenne entre 1950 et 1973. Le renchérissement des cours de l’or noir consécutif aux deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 stoppe cette dynamique. Au quatrième trimestre 1974, la France entre en récession pour la première fois depuis les évènements de mai 1968. En 1975, le PIB recule de près de 1 %. Ces évènements marquent la fin d’une période de croissance soutenue. En conséquence, la France quitte le plein-emploi et voit le chômage augmenter régulièrement au cours des années 1970. Alors que le taux de chômage est de 3 % au début de l’année 1975, il atteint 5,1 % fin 1979.
Dans le même temps, les prix explosent en France. L’inflation s’envole, en effet, à plus de 13 % en 1974 et atteint régulièrement des niveaux à deux chiffres dans les années qui suivent. Ralentissement économique et inflation forte : la France entre alors dans l’ère de la « stagflation » ! Celle-ci est la conséquence directe du renchérissement des prix du pétrole, décidé par les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) ; lequel entraîne une augmentation des coûts de production dans les pays importateurs de pétrole, comme la France, ce qui alimente l’inflation et déprime la demande.
Pour lutter contre cette stagflation, la politique menée au cours la présidence de Valéry Giscard d’Estaing est d’inspiration libérale. Il s’agit avant toute chose de retrouver la stabilité monétaire et de rétablir les marges des entreprises. A ce titre, Valéry Giscard d’Estaing et son gouvernement mené à partir de 1976 par Raymond Barre, un économiste, font leur la formule du chancelier ouest-allemand Helmut Schmidt : « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ».
Les mesures d’austérité constituent le principal outil utilisé. Deux plans d’austérité sont ainsi mis en œuvre respectivement en 1976 et 1977. Ils prévoient notamment la limitation de la hausse des salaires, le gel du prix de certains produits de consommation, ainsi que la baisse du taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur certains produits. Les effets sur l’inflation de ces mesures sont, somme toute, limités. En revanche, le chômage bondit : le seuil symbolique du million de chômeurs est, pour la première fois, dépassé en 1977.
La politique industrielle marquée par quelques grands projets
Par ailleurs, lorsque Valéry Giscard d’Estaing arrive à l’Elysée, la France est déjà entrée dans un processus de désindustrialisation. Alors que l’industrie pesait plus de 30 % dans la valeur ajoutée totale au début des années 1960, cette part est de 29 % en 1974. Valéry Giscard d’Estaing ne parvient pas, au cours du septennat, à stopper cette désindustrialisation. Cette dernière semble même s’accélérer, en dépit de quelques grands projets menés alors, au cours de la période 1974-1980. Fin 1980, la part de l’industrie dans la valeur ajoutée totale n’est plus que de 27 %.
Devant le constat de la désindustrialisation progressive de la France, Valéry Giscard d’Estaing a tenté d’initier ou de développer plusieurs grands projets industriels. Ainsi, face à la hausse des cours du pétrole, qui a mis en évidence la dépendance énergétique de la France vis-à-vis du reste du monde, il poursuit le développement du programme nucléaire civil français et l’intensifie. A son arrivée au pouvoir, Valéry Giscard d’Estaing inscrit sa politique énergétique dans la droite ligne de celle initiée par Pierre Messmer. Dernier Premier ministre de Georges Pompidou, celui-ci prévoyait la construction de près de 13 réacteurs en France en l’espace de deux ans. Finalement, la construction de sept centrales nucléaires est engagée entre 1974 et 1976.
Outre le nucléaire, un autre chantier de taille est développé au cours de la présidence de Valéry Giscard d’Estaing : le train à grande vitesse (TGV). Initiée par ses prédécesseurs, la modernisation du transport ferroviaire se concrétise en 1978 par les premiers essais de rames à grande vitesse reliant Paris à Lyon. Ironie de l’histoire, le service commercial du TGV débute en septembre 1981, soit quelques mois tout juste après le départ de Valéry Giscard d’Estaing de l’Elysée.
Le Système monétaire européen (SME) et l’écu : un pas supplémentaire vers l’Union monétaire en Europe
Chargé d’organiser le système financier international de l’après Seconde Guerre mondiale, le système de Bretton Woods, décidé en 1944, prend fin, de facto, le 15 août 1971 avec la décision des Etats-Unis de suspendre la convertibilité-or du dollar. Les accords de Kingston en Jamaïque, signés en 1976, mettent, de jure, terme au système de Bretton Woods en confirmant l’abandon du rôle légal international de l’or.
L’abandon des accords de Bretton Woods fait entrer le système financier international dans une période de grande instabilité, dans lequel les devises fluctuent largement et font, parfois, l’objet d’attaques spéculatives. Dans ce contexte, les pays européens, sous l’impulsion de la France de Valéry Giscard d’Estaing et de l’Allemagne d’Helmut Schmidt, tentent de rétablir une certaine stabilité monétaire en Europe, avec la création du Système monétaire européen (SME).
Entré en vigueur le 13 mars 1979, le SME repose sur trois piliers. Tout d’abord, il établit un système de changes fixes, mais ajustables, entre chaque monnaie des pays adhérents et un numéraire commun créé à cette occasion, l’écu. Ce dernier, calculé à partir d’un panier composé de différentes monnaies européennes, fait office de valeur pivot de référence au sein du Système. Le SME prévoit, en outre, un mécanisme répartissant de manière équilibrée les interventions de change entre les différents pays. Le SME instaure, enfin, une certaine solidarité entre les pays adhérents, ceux-ci mettant partiellement en commun leurs réserves de change et pouvant accorder des aides ponctuelles, afin de soutenir un pays confronté à des problèmes de balance de paiements.
A sa création en 1979, le SME comptait 8 pays adhérents : l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, la France, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas.
Le SME a connu un succès relatif au cours des années 1980. Il a notamment permis de rétablir une certaine stabilité monétaire et un net recul de l’inflation en Europe, au prix certes de plusieurs ajustements de change. Il disparaît toutefois au cours de l’été 1993, suite à une nouvelle attaque spéculative subie, cette fois-ci, par le franc. Il demeure de ce Système une plus grande coordination des politiques économiques en Europe et une référence européenne (contrairement à l’or ou au dollar utilisés précédemment) commune adoptée pour assurer la stabilité monétaire, l’écu. Bien qu’il ne constitue par une monnaie en tant que telle, l’écu préfigure l’euro, né le 1er janvier 1999 et dont la valeur fut alors, de manière symbolique, fixée à un écu.