Le profit des multinationales enfin taxé à 15 % minimum
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a annoncé, vendredi 8 octobre, que 136 pays ont adhéré à la « Déclaration sur la Solution reposant sur deux piliers pour résoudre les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie ». Comme l’indique sa désignation officielle, cet accord repose sur deux piliers :
- Il instaure, tout d’abord, une plus grande équité en matière de droits d’imposition des sociétés multinationales en taxant une partie de leurs bénéfices non plus dans leur pays d’origine, mais dans les pays où elles exercent et réalisent ces bénéfices. Cette disposition concernera les multinationales dont le chiffre d’affaires dépasse, à l’échelle mondiale, 20 milliards d’euros et dont la rentabilité est supérieure à 10 % ;
- Il prévoit, ensuite, l’application d’un taux minimal d’imposition des multinationales de 15 %. Ce taux s’appliquera aux entreprises réalisant un chiffre d’affaires de plus de 750 millions d’euros.
Discuté depuis de nombreuses années sous l’égide de l’OCDE, la signature d’un tel accord sur la taxation des multinationales est due notamment au changement de position opéré par l’administration américaine avec l’élection de J. Biden.
Taxation des multinationales : un net progrès mais des lacunes sérieuses
Cet accord devrait, tout d’abord, permettre aux États de collecter davantage de recettes fiscales. L’OCDE estime, en effet, que le premier pilier de l’accord devrait déboucher sur une redistribution de recettes fiscales à hauteur de 125 milliards d’euros, tandis que le taux minimal d’imposition des multinationales devrait permettre aux États de dégager 130 milliards d’euros de recettes supplémentaires.
Dans un article récent, les économistes T. Tørsløv, L. Wier et G. Zucman estiment que les multinationales transfèrent, globalement, près de 36 % de leurs bénéfices dans des paradis fiscaux.
Cet accord ne met pas fin aux paradis fiscaux
De l’aveu même de l’OCDE, cet accord reste toutefois insuffisant pour mettre fin à la concurrence fiscale entre les États. Tout d’abord, bien que les 136 pays ayant adhéré à la Déclaration représentent près de 90 % du PIB mondial, l’accord laisse de côté de nombreux territoires considérés à l’heure actuelle comme des paradis fiscaux.
Toutes les multinationales ne sont pas concernées
L’accord ne concerne, en outre, qu’une fraction seulement des multinationales. Au cours de l’été, J. Yellen, Secrétaire du Trésor américain, avait ainsi reconnu qu’une entreprise comme Amazon ne serait pas concernée par ces mesures, puisque sa rentabilité est inférieure au seuil de 10 %.
Le taux de 15 % de taxation des multinationales est modeste
Pour certains économistes, enfin, le taux retenu de 15 % apparaît comme faible. Tout en reconnaissant que l’accord mondial sur la taxation des multinationales constitue « un grand pas en avant », J. Stiglitz regrette qu’il ne soit pas plus ambitieux. Il plaidait, en effet, pour un taux minimum de 25 %, plus susceptible de limiter la concurrence fiscale entre les États.