Modalités envisagées pour la nationalisation d’EDF
La Première ministre, Élisabeth Borne, avait annoncé, mercredi 6 juillet, lors de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale la volonté du gouvernement de nationaliser EDF. Avec cette opération, l’État, actuellement détenteur d’environ 84 % du capital d’EDF, deviendrait l’unique actionnaire de la compagnie.
Créé en 1946 par la loi sur la nationalisation de l’électricité et du gaz sous la forme d’un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), EDF est devenu une société anonyme en 2004 et a été partiellement privatisée l’année suivante, 15 % de son capital ayant été introduit à la Bourse de Paris.
Le gouvernement a, depuis, précisé les modalités de cette opération : il proposera, vraisemblablement d’ici le début du mois de septembre, aux actuels actionnaires 12 euros par action EDF. Il s’agit d’une prime de 53 % par rapport au cours de l’action juste avant la déclaration d’É. Borne (7,84 euros). Le coût total pour les finances publiques de cette offre publique d’achat (OPA) devrait atteindre 9,7 milliards d’euros.
L’entité à l’origine de l’OPA, qu’il s’agisse d’une entreprise ou comme ici de l’État, offre habituellement une prime en proposant un prix supérieur au dernier cours coté. Il s’agit, en effet, d’inciter les actionnaires à apporter leurs titres.
Raisons de la nationalisation d’EDF
Plusieurs facteurs peuvent expliquer la décision du gouvernement de « nationaliser » à 100 % EDF. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a, tout d’abord, insisté sur les enjeux stratégiques d’une telle opération. Dans un contexte de forte tension sur les marchés de l’énergie, notamment depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, il a souligné que la nationalisation d’EDF « renforce l’indépendance énergétique de la France », avant de poursuivre : « elle donne à EDF les moyens nécessaires pour accélérer la mise en œuvre du programme de nouveau nucléaire voulu par le président de la République, et le déploiement des énergies renouvelables en France ».
Nationalisation de EDF : un impact a priori limité pour les consommateurs
La nationalisation d’EDF ne devrait pas avoir d’impact majeur à court terme pour les particuliers. En effet, l’État est déjà l’actionnaire majoritaire de la société : il pourra donc continuer à lui imposer ses choix. EDF sera, en outre, toujours soumise aux règlementations en vigueur. Par exemple, elle devra continuer à vendre une partie de l’électricité produite à un tarif fixe comme le prévoit l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH).
Pour certains observateurs, c’est surtout la situation financière très fortement dégradée d’EDF qui explique la décision du gouvernement de nationaliser (ou étatiser) à 100 % l’entreprise. Celle-ci est, en effet, endettée à hauteur de 44 milliards d’euros et son niveau d’endettement devrait encore augmenter en 2022. Des pertes importantes sont également attendues en fin d’année. Cette situation extrêmement difficile s’explique notamment par le bouclier tarifaire : alors que les coûts d’approvisionnement d’EDF augmentent, dans un contexte de forte tension sur les prix de l’énergie, ses recettes ne suivent pas. Cette tension conjoncturelle s’ajoute à des difficultés industrielles (arrêt de plusieurs centrales, maintenance et révision de plusieurs réacteurs…).
Dans ces conditions, il devenait de plus en plus difficile pour EDF, en tant que société cotée, de se financer et de mettre en œuvre les investissements nécessaires au renouvellement du parc nucléaire français. Le contrôle à 100 % d’EDF et la sortie de la cote devraient également faciliter la réforme du groupe préconisée par l’exécutif.