Royaume-Uni : contexte macroéconomique dégradé
Le Royaume-Uni a vécu, la semaine dernière, deux bouleversements politiques avec, d’une part, la nomination de Liz Truss en remplacement de Boris Johnson au poste de Premier ministre le 6 septembre et, d’autre part, l’accession au trône de Charles III deux jours plus tard. Ces changements majeurs interviennent alors même que le Royaume-Uni traverse une période difficile sur le plan économique.
Le Royaume-Uni connaît, tout d’abord, une inflation à deux chiffres. Selon l’Office National de Statistiques britannique, la hausse des prix a atteint, en rythme annuel, 10,1 % en juillet dernier. À titre de comparaison, l’inflation annualisée était de 8,5 % à la même date aux États-Unis et de 8,9 % à la même date en zone euro. Ce différentiel d’inflation s’explique notamment par la chute de la valeur de la livre sterling – qui renchérit les importations –, et la plus forte dépendance de l’économie du Royaume-Uni au gaz, dont le prix a été multiplié par 5 en l’espace d’un an, du fait notamment de la guerre en Ukraine. Les perspectives en matière d’inflation ne sont, en outre, guère réjouissantes : malgré plusieurs hausses de ses taux d’intérêt directeurs, la Banque d’Angleterre n’anticipe pas de diminution du taux d’inflation « avant l’année prochaine ». De son côté, la banque américaine Citi estime que l’inflation pourrait atteindre 18,6 % en rythme annuel en janvier prochain.
Dans le même temps, la croissance économique ralentit au Royaume-Uni. Si l’OCDE prévoit toujours une progression de l’activité économique de 3,6 % en 2022, le produit intérieur brut (PIB) britannique a reculé de 0,1 % au cours du deuxième trimestre 2022. Cette stagnation de l’activité économique devrait se poursuivre en 2023 : l’OCDE anticipe, en effet, une croissance économique nulle pour le Royaume-Uni, alors même que la progression du PIB des autres pays du G7 devrait être comprise entre 1,2 % (pour l’Italie et les États-Unis) et 2,6 % (pour le Canada).
Les difficultés économiques du Royaume-Uni alimentent une crise sociale. Ce ralentissement de l’activité économique (et donc des revenus), mêlé à la forte inflation que connaît actuellement le Royaume-Uni, est, en effet, synonyme de baisse du pouvoir d’achat pour les ménages. Ainsi, selon les données de l’Office britannique de Statistiques, le salaire réel, c’est-à-dire tenant compte de l’inflation, a diminué d’environ 3 % en rythme annuel au deuxième trimestre 2022. En termes de revenus des ménages, la baisse pourrait atteindre 10 % d’après les estimations du think-tank britannique Resolution Foundation. Toujours selon celles-ci, 3 millions d’individus pourraient même passer sous le seuil de pauvreté.
Programme de Liz Truss au Royaume-Uni
Dans ce contexte, les premières réformes mises en œuvre par Liz Truss, Première ministre du Royaume-Uni, seront scrutées de près. Celle-ci a d’ores et déjà annoncé des mesures concernant le prix de l’énergie. Alors qu’elle était, au cours de la campagne pour désigner le chef du Parti conservateur, fermement opposée à la mise en place d’un système d’aides, Liz Truss a présenté, jeudi 8 septembre, un plan destiné à limiter l’impact de la hausse des prix de l’énergie. Ce plan, visant tant les ménages que les entreprises, figure parmi les plus généreux distribués en Europe : selon les experts, il pourrait atteindre un montant de 150 millions de livres, soit environ 6,8 % du PIB du Royaume-Uni.
Ce plan garantit, par exemple, que la facture énergétique annuelle moyenne des ménages ne dépassera pas 2 500 livres (soit environ 2 880 euros) au cours des deux prochaines années, alors même que certaines prévisions faisaient état d’un possible doublement de ces dépenses.
Liz Truss a, dans le même temps, annoncé vouloir relancer massivement l’exploitation de gaz et de pétrole dans la mer du Nord afin de lutter contre la crise énergétique.
Liz Truss, la nouvelle dame de fer
Fervente admiratrice de Margaret Thatcher, Liz Truss avait également annoncé, au cours de la campagne, son intention de procéder à une baisse massive de la fiscalité, notamment la fiscalité verte et celle pesant sur les bénéfices des entreprises. La Première ministre devrait, ainsi, annuler l’augmentation de l’impôt sur les sociétés prévue pour l’année prochaine (le taux devait passer de 19 à 25 %). De façon à ne pas dégrader les finances publiques, cette baisse de la fiscalité devrait s’accompagner d’une réduction des dépenses publiques, même si les détails n’en sont pas encore connus à l’heure actuelle : Liz Truss a, en effet, annoncé renoncer à la baisse du salaire des fonctionnaires, envisagée lors de la campagne.