Pour cette 4ème édition, ce panorama mondial de la contribution de la finance à la sortie des énergies fossiles et de la baisse des financements fossiles montre à la fois que si l’objectif de mobilisation de 100 milliards par an n’a pas été atteint en 2020, des évolutions positives sont enregistrées dans trois champs : la réglementation, la supervision, et la transparence.
En 2020, les financements verts internationaux n’ont pas atteint leur promesse de 100 milliards de dollars
Avec 83,3 milliards de dollars, l’objectif de mobiliser 100 milliards par les pays développés pour les pays en développement (PED) n’a pas été atteint en 2020, alors que la COP15 de Copenhague (2009) avait conclu, après d’âpres négociations sur la répartition financière entre nord et sud, que ce montant serait nécessaire dès 2020 pour garantir la réduction des émissions de GES et l’adaptation des PED au changement climatique.
Cependant, le rapport montre que les flux financiers verts, avec un montant total de 632 milliards de dollars, ont été en hausse de + 10 % entre 2019 et 2020, de + 53 % par rapport à 2017/2018
Mais la baisse du financement des énergies fossiles s’est poursuivie en 2020
Un autre rapport, fossil fuel finance report 2022 (en anglais), met en évidence qu’avec 742 milliards de dollars de financements accordés par les 60 plus grandes banques mondiales aux énergies fossiles en 2021, la finance carbone enregistre une deuxième année de baisse consécutive, après le pic de financements fossiles enregistré en 2019 (830 milliards de dollars).
Deux banques françaises sont citées en exemple pour avoir décidé de ne plus financer du tout les énergies fossiles.
Point positif mis en avant dans le rapport de Climate Chance : l’augmentation du nombre de professionnels signataires de l’engagement Net Zero (neutralité carbone à l’horizon 2050).
273 signataires de la « Net Zero Asset Managers Initiative », 115 signataires de la net Zero Banking Alliance, 20 signataires de la Net Zero Insurance alliance
2020 marque aussi le renforcement des taxonomies, et l’effort de transparence des réglementations extra-financières
La tendance étant clairement à une hausse des financements verts (ralentie durant la période du Covid), le rapport observe que depuis 2 ans les autorités réglementaires ont accru les réglementations des « taxonomies vertes ». D’un côté, les États mettent en place des taxonomies établissant des critères objectifs d’évaluation des critères ESG (environnement, social, gouvernance), de l’autre, des règles de transparence des entreprises sur leurs contributions extra-financières sont renforcées pour mieux informer l’investisseur sur les performances ESG.
La taxonomie verte
La taxonomie verte établit une classification des activités économiques qui permet d’indiquer à un investisseur si cette activité est durable. La taxonomie est utilisée pour l’attribution des « labels verts », elle vise à limiter l’éco-blanchiment (« green washing ») et à favoriser le développement de la finance verte (obligation verte, finance à impact).
L’Europe fait figure de leader mondial en matière de taxonomie (sa mise en œuvre a débuté début 2022), les prochaines années devraient être décisives pour la mise en place d’une réglementation américaine.
L’extension par les superviseurs de la pratique du stress test au domaine climatique
La Banque centrale européenne a réalisé début 2022 le premier stress test climatique auprès de 104 institutions financières. Il s’agit pour le superviseur d’évaluer la capacité de résistance et d’absorption par les acteurs financiers des risques financiers liés au changement climatique (RFC) et de voir dans quelle mesure un stress test climatique peut devenir un outil de supervision financière.
Les risques financiers liées au changement climatique sont divisés en trois catégories : les « risques de transition » (effets économiques d’un modèle bas carbone), les « risques physiques » (effets économiques du changement sur l’environnement) et les « risques de responsabilité » (risque réputationnel et judiciaire).
Dans l’immédiat, la BCE a indiqué qu’elle n’utilisera pas les résultats du stress test pour fixer de nouvelles obligations de fonds propres au secteur financier. Mais il apparait certain que les institutions seront appelées à développer des compétences et des méthodologies internes permettant de mieux modéliser et quantifier les RFC selon les scénarios d’évaluation de chacune des trois catégories de risques.
Le marché de l’ESG à la recherche de plus de fiabilité et de transparence
Alors que les fonds ESG (environnement, social, gouvernance) sont en plein essor depuis la sortie du Covid – 750 Milliards de dollars en 2020 au niveau mondial, soit + 20 % -, le rapport souligne pourtant la nécessité d’accroitre la fiabilité des données transmises par les entreprises, la transparence et l’harmonisation des méthodologies utilisées pour les performances ESG, afin de garantir auprès de l’investisseur la conformité entre les actifs ESG et leurs objectifs climatiques et de développement durable (ODD).
Les efforts des autorités réglementaires et politiques (dont la future directive CSRD) pour imposer des règles unifiées et strictes de reporting extra-financier à partir d’indicateurs robustes et faciles d’accès pour toutes les parties prenantes vont dans ce sens et devraient clarifier les concepts, les activités et les investissements éligibles, encore trop flous.
Création de l’Institut pour la finance durable
Paris Europlace a annoncé fin octobre la création de l’« Institut pour la finance durable ». Sa vocation est de renforcer la concertation entre les pouvoirs publics, le secteur financier et le secteur industriel, et de décliner de façon opérationnelle, la stratégie définie au Comité de place du financement de la transition écologique, animé par le ministère de l’économie et des finances.
Considérant que les structures actuelles d’accompagnement de la finance verte (Finance for Tomorrow, Institut Louis Bachelier, Observatoire de la finance durable,) gagneraient à davantage de coopération voire d’intégration, le rapport Perrier (mars 2022 – « Faire de la Place financière de Paris une référence pour la transition climatique : un cadre d’actions ») recommandait la création de deux organismes de coordination : le premier serait « politique », et le second serait « opérationnel ».
Le rapport Perrier insistait sur la nécessité d’entrer dans une logique de « co-construction » et de « co-pilotage », la réussite de la transition énergétique exigeant des investissements considérables, concentrés sur 10 à 15 ans et une innovation financière soutenue (financements publics/privés, financements spécifiques, création de fonds européens).
La création de l’Institut pour la Finance Durable fait également suite à la mise en place fin 2021 d’une nouvelle gouvernance du Label ISR avec l’installation d’un nouveau comité du label ISR. La tâche du nouveau comité est de proposer à l’État un nouveau référentiel qui permettra d’apporter plus de clarté à l’épargnant désireux d’investir ISR. Ce nouveau rapport a été remis à l’État, le 26 octobre 2022.