Un déficit inédit
Le déficit public français est au plus haut, atteignant 6 % du PIB en 2024. Un tel écart entre recettes et dépenses est historique, si on met de côté les périodes de crise où l’Etat se doit d’intervenir massivement.
Le déficit actuel fait peser deux risques majeurs sur l’économie française. Tout d’abord, bien loin de respecter le plafond européen de 3 %, il pourrait provoquer des sanctions économiques de la part de l’Union Européenne, qui souhaite à tout prix inciter ses membres à suivre une certaine rigueur budgétaire.
Surtout, ce déficit étant financé par de la dette publique, il fait courir un risque d’insoutenabilité. La dette publique est achetée par des investisseurs (français ou étrangers) par ce qu’ils estiment que l’Etat a la capacité de la rembourser. Or, cette dérive du déficit ne laisse rien présager de bon. L’équilibre budgétaire parait, dans une certaine mesure, hors de contrôle. Résultat, les investisseurs exigent un rendement plus élevé pour se couvrir contre le risque de non-remboursement, et les taux d’intérêt de l’Etat français augmentent. La dette coûte donc encore plus chère, ce qui initie parfois des cercles vicieux.
Pour résorber ce déficit, l’État dispose de deux leviers majeurs : réduire ses dépenses, et augmenter ses recettes. La Cour des Comptes a, par exemple, publié un certain nombre de préconisations concernant les dépenses de santé. Mais, depuis quelques jours, ce sont les niches fiscales qui agitent tous les débats. Bercy propose de s’attaquer à certaines d’entre elles.
La suppression d’une niche fiscale peut aussi bien être vue comme une baisse des dépenses (semblable à une subvention) ou bien à une augmentation des recettes (puisqu’il s’agit d’augmenter l’assiette d’un impôt)
Niches fiscales : un coût de plus de 85 milliards d’euros
Les niches (ou dépenses fiscales) sont détaillées dans la loi de finances chaque année (Evaluation des voies et moyens). Comme le précise le rapport, « le nombre des dépenses fiscales s’élève à 474, dont 65 sont en cours d’extinction (40 déjà éteintes mais ayant encore un impact en 2023, et 25 dont le fait générateur arrive à échéance en 2024).
Cependant, sur les 85 milliards d’euros de coût que représentent la totalité des niches fiscales, la moitié repose sur seulement 15 dispositifs !
Le gouvernement étudie de nombreuses solutions pour réduire le déficit. À commencer par la suppression de « petites niches profitant à moins de 100 contribuables » (particuliers et entreprises). Le rapport précise en outre que 60 dispositifs sont non chiffrables et 27 sont sans impact. Mais ces petits dispositifs ne permettent pas de faire des économiques significatives.
Parmi les niches les plus coûteuses, le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt pour emploi à domicile. Ce dernier avantage, qui profite à tous les contribuables, pourrait être revu à la baisse : soit être accordé sous conditions de ressources, soit limité à certaines activités (personnes âgées). Le cour des Compte a recommandé de réduire le taux de l’avantage fiscal pour certaines activités. Pour rappel, il est obligatoire depuis deux années de préciser le type de service financé. A suivre.
Abattement de 10 % sur les retraites : le dilemme
Autre piste envisagée : revenir sur l’abattement dont profitent les retraités, au même titre que les actifs, de 10 % sur leurs pensions. Un dispositif mis en place il y a près de 50 ans. Cet abattement de 10 % se justifie, pour les salariés, au titre des frais professionnels (ils peuvent, sur option, déclarer ces frais au réel). Mais revenir sur cet avantage génèrerait une hausse d’impôt pour les retraités : ceux qui sont imposables verraient leur impôt augmenter, et 500 000 contribuables deviendraient imposables, selon le Parisien. La suppression pourrait rapporter près de 5 Mds€. Mais de nombreux experts estiment qu’il sera difficile de revenir sur ce dispositif.
La porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, a récemment annoncé que toutes les pistes étaient envisagées : « Il y aura ensuite des choix qui seront faits. Ceux-ci seront annoncés aux alentours des orientations, vers le 14 juillet ».