17 juillet 2007, l’effondrement de deux fonds d’investissement de la Banque américaine Bear Stearns (celle-là même dont la Banque centrale des États-Unis a récemment évité la faillite) donne le signal de la crise financière des subprime. 9 mois déjà que cela dure. Quel impact cela a-t-il sur les comportements d’épargne et d’investissements des ménages en France ?
Ce qui était prévu :
En mars 2008, l’INSEE prévoyait, pour le 1er semestre 2008, les évolutions suivantes :
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le revenu des ménages devait ralentir et le pouvoir d’achat devait se ressentir d’une inflation qui ne dégonflerait qu’au 2ème semestre;
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la consommation devrait être affectée mais pas trop;
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en effet, le taux d’épargne devait diminuer pour se situer un peu en dessous des 16 % atteints en 2007. Le déblocage anticipé de la participation devait contribuer à cette baisse du taux d’épargne;
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l’investissement des ménages (essentiellement le logement) devait poursuivre son ralentissement (+1,6 % en 2007 contre +4,5 % en 2006) et connaître une croissance 0.
Ce qui se passe :
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l’accélération de l’inflation dépasse les prévisions (+3,2 % en mars en croissance annuelle) et le moral des ménages est en berne ;
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la consommation ralentit plus que prévu. La consommation des ménages en produits manufacturés (automobile, équipement des logements, textiles…) a baissé de 1,7 % en mars 2008 par rapport à février.
Certes, il ne faut pas trop extrapoler sur des résultats mensuels, mais le ralentissement sur l’ensemble du 1er trimestre est très net (+ 0,6 % seulement par rapport au 1er trimestre 2007).
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Les prix de l’immobilier ont semble-t-il commencé à reculer. Ce qui traduit le ralentissement de l’investissement immobilier des ménages. Les professionnels s’attendent cependant à un repli beaucoup plus limité qu’en Espagne ou au Royaume-Uni.
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Les crédits distribués diminuent : selon l’enquête mensuelle de l’Association Française des sociétés financières (ASF), les nouveaux crédits à la consommation distribués par les établissements de crédits spécialisés sont en baisse (-0,4 % au 1er trimestre 2008 par rapport à 2007 et surtout -6,8 % en mars 2008 par rapport à mars 2007). Ce n’est pas l’offre de crédit qui est restreinte mais la demande qui faiblit. Les ménages craignent davantage de s’endetter. La tendance est la même pour le crédit immobilier.
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Au total, il semble bien que les ménages hésitent à réduire leur épargne pour maintenir leur niveau de consommation. Ainsi, les salariés sont loin d’utiliser massivement les possibilités de déblocage anticipé de la participation.
Sur le 1er trimestre 2008, le montant des déblocages enregistrés par Natixis Inter-Epargne qui gère 25 % environ de l’ensemble de l’épargne salariale, n’a été que de 524 millions d’Euros. Pour toute l’épargne salariale (94 milliards d’encours environ fin 2007) cela ne ferait que 2 milliards. Certes, les salariés ont jusqu’à fin juin pour se décider, mais il semble bien que l’on soit en dessous des flux de sorties engendrés par les deux précédents déblocages anticipés de 2004 et 2005.
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De l’épargne mais moins d’investissement immobilier… Cela devrait se traduire finalement par un flux assez élevé d’investissements financiers avec une forte réorientation vers les placements liquides. Dans le contexte de soubresauts boursiers importants, les ménages réorientent leur flux d’épargne, si non leur stock de placements financiers vers « l’épargne liquide » : les produits d’assurance vie attirent moins.
La collecte du marché de l’assurance-vie en France serait, au premier trimestre 2008, en baisse de 10 %. (Gilles Benoist, Directeur Général de la CNP 22 avril – AG). Le recul est semble-t-il plus sensible pour les supports en unités de compte que ceux en Euros au rendements « garantis ». D’autant que les rendements de ces derniers supports qui n’avaient cessé de faiblir ces dernières années sont en hausse en 2007 (ils seront en moyenne proches de 4,5 % brut) .
Cette réorientation des placements financiers vers les placements liquides était déjà sensible en 2007. La croissance la plus spectaculaire ayant été, selon l’Observatoire Permanent des Marchés de l’Épargne et du Crédit, celle des dépôts à terme de moins de 2 ans.
Une croissance d’autant plus forte, souligne l’Observatoire, qu’il y a eu un « fort effet d’offre ». Celui-ci se poursuit.
Les établissements bancaires se livrent à une surenchère d’offres promotionnelles sur les livrets rémunérés : 5% ici, 6 % là, et même plus ailleurs… Attention cependant, il s’agit toujours de taux bruts et il faut donc enlever 29% de prélèvements sociaux et fiscaux pour avoir la rémunération nette effective. Attention également à bien lire les conditions liées à ces offres: le plus souvent elles ne sont valables que sur un certain montant et pour une période limitée de temps (4 ou 6 mois).
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