Le plafonnement par la loi des délais de paiement est récent. Il a été introduit le 4 Août 2008 dans la loi dite de modernisation de l’économie. Toutefois, dans la pratique, il ressort que la plupart des secteurs d’activité n’arrivent toujours pas à respecter ces délais.
Les modalités réglementaires
En l’absence d’indications dans les conditions de vente, la date limite de règlement est fixée au 30e jour suivant la date de réception ou d’exécution de la prestation.
De nombreuses dérogations
Les délais de paiement peuvent faire l’objet d’un accord entre l’entreprise cliente et le prestataire. Le délai ne peut alors dépasser 60 jours à compter, cette fois-ci, de la date d’émission de la facture.
Par dérogation, le paiement peut aussi être fixé à 45 jours sans que la loi impose la date qui enclenchera ce décompte. Le client et le fournisseur peuvent alors choisir la fin du mois de l’émission de la facture ou la date d’émission de cette facture avec un paiement à la fin de mois. Ce délai doit alors impérativement être stipulé dans le contrat ou les conditions générales de vente et sur la facture.
En revanche, pour des prestations réalisées fréquemment et qui sont regroupées dans une seule facture – aussi appelée facture récapitulative périodique – le délai est de strictement 45 jours à compter de l’émission de la facture.
Une durée de vérification et d’acceptation de la marchandise peut repousser le délai de paiement, mais elle doit être prévue par contrat et ne pas être abusive.
Enfin, des secteurs à l’activité saisonnière (articles de sport de glisse, commerce de bijoux et de jouets…) ou faisant le commerce de produits périssables, font eux l’objet d’une réglementation particulière.
Le cas spécifique de l’administration publique
Depuis 2008, l’État s’est engagé à réduire ses délais de paiement à 30 jours. En 2013, il a étendu cette discipline de gestion à l’ensemble des contrats de commandes publiques à l’exception des établissements de santé.
En 2012, l’État s’est engagé à aller plus loin en visant de réduire ses délais de paiement à 20 jours en 2017.
Les sanctions
Depuis le 1er janvier 2013, une indemnité de 40 euros pour couvrir les frais de recouvrement a été mise en place.
La mention et le montant de cette indemnité forfaitaire doivent obligatoirement figurer dans les conditions générales de vente et dans les factures.
Cette indemnité s’ajoute aux pénalités de retard qui prennent la forme d’intérêts sur le montant de la facture (TVA comprise). S’il n’est pas défini contractuellement, le taux d’intérêt appliqué correspond au taux directeur semestriel de la Banque centrale européenne (BCE) – au 1er janvier ou au 1er juillet – majoré de 10 points. Si le taux directeur s’élève à 2 %, les indemnités seront alors de 12 %.
L’entreprise cliente et son prestataire peuvent néanmoins définir un taux inférieur mais il ne pourra pas être inférieur à 3 fois le taux de l’intérêt légal.
Ces taux sont publiés sur le site de la Banque centrale européenne.
Ces pénalités s’appliquent dès le lendemain de la date limite de paiement indiquée sur la facture ou par défaut le 31e jour suivant la date de réception de la marchandise ou de l’exécution de la prestation de service. Elles sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire.
Une entreprise qui ne respecterait pas ces délais de paiement s’expose à une sanction de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), sous forme d’une amende administrative qui peut atteindre 75 000 euros pour une personne physique et 2 millions d’euros pour une entreprise.
Mais avant de vous lancer dans une procédure judiciaire, sachez que depuis 2016, un médiateur des entreprises est chargé de faciliter la résolution des litiges de cette nature.
Des délais de paiement qui se réduisent
Selon l’Observatoire des délais de paiement, les entreprises devaient attendre 42 jours de chiffre d’affaires en 2021 avant d’être payées. Relativement que stable depuis 2011, la tendance est en amélioration par rapport au début des années 2000 où il fallait patienter 55 jours.
Des différences sectorielles
Les différences sectorielles sont importantes. Dans le commerce et la réparation automobile, les entreprises encaissent le paiement de leurs clients à 21,7 jours en moyenne alors que c’est dans le secteur « Information et Consommation » que les délais de paiement sont les plus grands, à 75,6 jours en moyenne.
Évolution des délais de paiement client par secteur (2000 – 2021)
2000 |
2021 |
|
Industrie manufacturière |
72,9 |
50,7 |
Construction |
70,4 |
59,4 |
Commerce et réparation automobile |
35,8 |
21,7 |
Transports et entreposage |
71,1 |
54,6 |
Hébergement et restauration |
9,2 |
6,2 |
Information et communication |
90,2 |
75,6 |
Activités immobilières |
18,6 |
25,4 |
Conseils et services aux entreprises |
82,6 |
69,4 |
Tous secteurs |
54,6 |
41,9 |
Sources : Observatoire des délais de paiement, rapports annuels.
Une source de financement
Certains secteurs peuvent générer de la trésorerie supplémentaire en réglant leurs fournisseurs le plus tard possible : à cet égard, la différence entre le délai de paiement clients et fournisseurs est un indicateur pertinent. La palme revient aux secteurs « Hébergement et restauration » et « Commerce et réparation automobile » dans lesquels les entreprises sont payées immédiatement, en particulier quand leurs clients sont des ménages, mais attendent plusieurs semaines avant de régler leurs fournisseurs.
Solde entre les délais de paiement clients et fournisseurs (2000 – 2021)
2000 |
2021 |
|
Industrie manufacturière |
23,2 |
16,1 |
Construction |
21,8 |
26,7 |
Commerce et réparation automobile |
-9,1 |
-8,4 |
Transports et entreposage |
35,5 |
28,7 |
Hébergement et restauration |
-16,4 |
-25,7 |
Information et communication |
41,1 |
40,3 |
Activités immobilières |
-6 |
3,4 |
Conseils et services aux entreprises |
44,5 |
42,1 |
Tous secteurs |
10,1 |
10,9 |
Sources : Observatoire des délais de paiement, rapports annuels.
C’est alors le secteur « Conseils et services aux entreprises » qui décroche la place la moins enviable, tandis que le secteur « Information et communication » réussit à reporter une partie des délais de paiement de ses clients sur ses fournisseurs.
Les grosses entreprises plus en retard que les autres
D’après la société de données économiques et financières Altares, les retards de paiement par rapport aux conditions contractuelles est de 11,7 jours au 4e trimestre 2022. Pour 6,1 % des entreprises, les retards de paiement dépassent 30 jours.
Les grandes structures ne sont pas les plus vertueuses
Ce sont les grandes structures qui affichent le plus de retard. Une société commerciale de plus de 1000 salariés affiche, au 4e trimestre 2022, 17,7 jours de retard de paiement contre 11,2 pour une entreprise comptant de 10 à 49 salariés.
Un lien direct avec les faillites
Si les pouvoirs publics s’intéressent d’aussi près aux délais de paiement, c’est parce qu’il y a une corrélation entre la défaillance d’une entreprise et ses retards de paiement. Jusqu’à 20 jours de retard, le risque de faillite est trois fois plus fort qu’une entreprise payant rubis sur l’ongle. Au-delà de 30 jours, la probabilité s’accélère pour être multipliée par 7.
Il est donc plus sûr de travailler pour un client qui est un bon payeur.
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