COP 21 : le décryptage de l’accord

la finance pour tous

Cet article a été rédigé en décembre 2015 et résume les principaux points de l’Accord de Paris.

L’accord adopté par consensus le 12 décembre 2015 par les 195 États participants à la 21ème conférence de l’ONU sur le climat à Paris constitue un accord historique.

COP 21 le decryptage de l accord Tous les États, et pas seulement les pays développés, s’engagent à diminuer, à plus ou moins long terme, leurs émissions de CO2. Salué par les dirigeants des États, l’accord fait l’objet d’appréciations plus nuancées de la part des ONG. Les unes considèrent qu’il constitue dans l’ensemble un cadre permettant d’enclencher une dynamique favorable des acteurs étatiques et non étatiques pour résoudre la crise climatique. Pour d’autres, l’accord ne permet pas de faire évoluer le monde réel vers les objectifs affichés.

Décryptage en 7 points clés.

COP : le plafond de réchauffement

Le mandat donné lors de la COP de Copenhague en 2009 était d’aboutir à un consensus sur un maximum de 2 °C de réchauffement.

L’accord de Paris va au-delà puisqu’il insiste sur la perspective de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation de température à 1,5 °C. Cela répond à une revendication des États insulaires menacés de submersion si le réchauffement dépasse ce niveau. Cet affichage a une portée symbolique et politique dans la mesure où les engagements volontaires actuels des États d’ici 2020 à 2030 mettent la planète sur la trajectoire d’un réchauffement estimé par les services de l’ONU eux-mêmes à 3°C environ.

L’objectif affiché de +1,5 °C renforce donc le besoin d’une réduction très rapide des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Selon les experts du GIEC (Groupement international des experts sur le climat), pour limiter le réchauffement à 2 °C, il faudrait baisser les émissions de 40 à 70 % d’ici 2050.

L’accord engage seulement à atteindre le pic d’émission « dès que possible », sans donner de date ni de chiffres. Par ailleurs, il ne retient pas un objectif à long terme de zéro émission de gaz, mais celui de parvenir au cours de la deuxième moitié du siècle « à un équilibre entre les émissions anthropiques et les absorptions anthropiques par les puits à gaz à effet de serre ».

Il mise donc sur le développement des techniques de stockage dans des puits de carbone (océans, forêts), sur la géo-ingénierie et sur les mécanismes permettant à des États de compenser la moindre réduction domestique de leurs émissions par le financement de ces méthodes à l’étranger.

Une procédure de révision des engagements

Pour ne pas dépasser +1,5 °C de réchauffement, les engagements des États définissant leurs objectifs d’évolution de leurs émissions de gaz et les moyens mis en œuvre pour les réaliser devront être impérativement révisés et renforcés. L’accord prévoit un mécanisme de révision tous les 5 ans.

Les révisions resteront volontaires. L’accord rentrera en vigueur en 2020. Les révisions ne devraient donc prendre effet qu’à partir de 2025. Pour de nombreux experts, ce serait trop tardif. Mais l’accord de Paris peut ouvrir la voie à une dynamique plus favorable. Une procédure de dialogue entre les signataires sur la révision des engagements sera engagée dès 2018. Un bilan global des impacts des contributions a été établi en 2023. Il révèle que les efforts mis en place ont certes des effets notables, mais trop limités pour contenir le réchauffement à 1,5 °C en 2030.

Le rapport onusien conclut donc que des efforts bien plus importants doivent être faits pour respecter les objectifs de l’accord. Les leviers les plus importants concernent toujours les énergies fossiles. S’en passer au moins en grande partie pourrait représenter 74 % de l’atténuation mondiale totale nécessaire.

Un niveau de contrainte juridique assez faible

Le texte adopté à Paris est divisé en deux parties une partie Accord proprement dit, et une partie Décisions, plus les annexes techniques comprenant notamment les engagements volontaires des États.

L’accord doit faire l’objet d’une ratification par les États d’ici 2016. Il entrera en vigueur s’il est ratifié par au moins 55 % des pays signataires, représentant au moins 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Seule la partie Accord sera juridiquement contraignante pour les États qui auront ratifié le texte. Une procédure de retrait volontaire leur sera néanmoins ouverte.

Des dispositions spécifiques visent à renforcer la transparence et la vérification de la mise en œuvre de l’accord et de leurs engagements par les États. La mise en œuvre restera néanmoins de leur responsabilité. Les États devront réaliser chaque année un rapport sur leur action avec un double examen par des experts de l’ONU et par les autres États.

Aucune procédure de sanction n’est prévue. Les effets de réputation pour les pays qui manqueraient à leurs obligations ne seront cependant sans doute pas négligeables. Mais le niveau de contrainte juridique reste faible comparé notamment à celui des accords commerciaux internationaux.

Les pays en développement invités à réduire aux aussi leurs émissions

L’accord de Kyoto de 1997 reposait sur un principe de responsabilité commune mais différenciée entre les pays développés responsables de la plus grande partie des stocks de gaz émis depuis la révolution industrielle et les autres pays. Depuis, les pays émergents, notamment la Chine, sont passés aux premiers rangs des pays émetteurs. L’accord de Paris maintient le principe de la responsabilité commune mais différenciée tout en faisant évoluer sa mise en œuvre, à la fois en ce qui concerne les objectifs de réduction des émissions et le financement des aides aux pays en développement.

L’accord affirme ainsi que « les pays développés devraient continuer de montrer la voie en assumant des objectifs de réduction des émissions en chiffres absolus ». Pour leur part, « les pays en développement devraient continuer d’accroître leurs efforts d’atténuation, et sont encouragés à passer progressivement à des objectifs de réduction ou de limitation des émissions à l’échelle de l’économie eu égard aux contextes nationaux différents ». (Article 4.4).

S’agissant du financement des aides aux pays en développement, l’accord établit une différence entre les contributions des pays développés et les contributions « des autres pays invités à fournir ou à continuer de fournir ce type d’appui à titre volontaire ».

Peu d’avancées concrètes s’agissant du financement des pays pauvres

Les pays développés ont promis en 2009 lors de la COP de Copenhague de mobiliser 100 milliards de dollars par an en 2020 en faveur des pays pauvres. L’accord de Paris fait de ces 100 milliards un plancher destiné à être relevé. Un nouvel objectif collectif chiffré d’aide financière devra être présenté avant 2025. Cette disposition ne figure cependant pas dans la partie Accord mais dans la partie Décisions, juridiquement moins contraignante. Les financements pour l’après 2020 ne sont pas mieux établis juridiquement que les 100 milliards prévus en 2009 et pas encore effectivement dégagés.

Les financements des actions d’adaptation et les compensations pour les pertes et dommages subis lors d’évènements climatiques extrêmes constituent également des points sensibles pour les pays pauvres et particulièrement vulnérables aux effets du réchauffement.

L’accord souligne « la nécessité d’éviter et de réduire au minimum les pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements climatiques ». Il engage les États à améliorer les dispositifs de coopération visant cet objectif. Mais il exclut toute responsabilité juridique des pays développés dans les pertes et dommages qui pourront être subis par les pays vulnérables (article 8).

Les financements pour l’adaptation font également l’objet de paragraphes qui soulignent l’importance de la question, mais leur rééquilibrage avec le financement de l’atténuation demandé par les pays pauvres n’est pas acté.

La reconnaissance des droits humains

La question des droits de l’homme s’articule de plusieurs manières à celle du réchauffement climatique, qu’il s’agisse des droits des populations indigènes ou des populations particulièrement menacées, des droits au développement ou des droits face aux mutations nécessaires des productions (droits sociaux ; droit à la sécurité alimentaire).

L’accord inscrit la reconnaissance de ces droits. Mais il le fait dans le préambule, et non dans l’article qui fixe les objectifs (article 2).

Cela limite la portée de l’engagement des États à les respecter dans leur action contre le réchauffement climatique : « Conscientes que les changements climatiques sont un sujet de préoccupation pour l’humanité tout entière et que, lorsqu’elles prennent des mesures face à ces changements, les Parties devraient respecter, promouvoir et prendre en considération leurs obligations respectives concernant les droits de l’Homme, le droit à la santé, les droits des peuples autochtones, des communautés locales, des migrants, des enfants, des personnes handicapées et des personnes en situation vulnérable et le droit au développement, ainsi que l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et l’équité entre les générations.»

Le prix du carbone et la transition énergétique

La question du prix du carbone et celle de la transition énergétique permettant de sortir des énergies fossiles étaient jugées par beaucoup comme des points clés.

Force est de constater que l’on n’en trouve pas trace dans l’accord de Paris.  

0 commentaire

Commenter