Le taux de cotisation
Le système français de retraite repose pour une très large part sur la répartition. Dans ce mode de gestion, les cotisations « retraite » versées par les actifs et notamment par les actifs salariés et leurs employeurs sont immédiatement utilisées pour payer les pensions. Les cotisations d’aujourd’hui financent ainsi les retraites d’aujourd’hui.
S’agissant des salariés, qui constituent plus de 85 % des cotisants, à côté des non-salariés (indépendants, professions libérales, agriculteurs) et les régimes spéciaux (militaires, SNCF, notaires…), deux situations sont à distinguer : le cas des salariés du régime général (plus de 70 % des cotisants) et ceux de la fonction publique (plus de 15 % des cotisants).
Le régime général
Les retraites du régime général se composent du régime de base et des retraites complémentaires.
Dans le régime de base, le taux qui détermine le montant des cotisations comprend :
- d’une part le taux de la cotisation d’assurance vieillesse, qui s’applique au plafond de la sécurité sociale (3 311 euros mensuels pour 2018), et atteint 8,55 % à la charge de l’employeur, et 6,9 % à la charge du salarié.
- d’autre part le taux de cotisation vieillesse qui s’applique à la totalité du salaire brut et atteint 1,9 % pour la part patronale et 0,4 % pour la part salarié.
A ce premier niveau de retraite obligatoire, s’ajoute la retraite complémentaire qui donne lieu à un autre taux de cotisation. La retraite complémentaire recouvre notamment les régimes Arrco (Association des régimes de retraites Complémentaires) pour tous les salariés et Agirc (Association générale des institutions de retraites des Cadres) pour les cadres, ainsi que le régime Ircantec pour les agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques.
Selon les calculs de l’Observatoire des Retraites, créé en 1991 par les régimes Agirc et Arrco, les taux de cotisation retraite pour les salariés du secteur privé étaient de 7,75% jusqu’au plafond de la sécurité sociale, et 20,25 % au-delà pour l’Arrco et 20,55 % pour l’Agirc : les salariés non cadres en supportent un tiers tandis que l’employeur verse deux-tiers de ces cotisations. Pour les cadres, la répartition est identique jusqu’au plafond de la sécurité sociale. Au-delà, l’employé en supporte une part plus importante (38 % de ces cotisations).
Les régimes de la fonction publique
Dans la fonction publique, le taux de cotisation salariale pour la retraite de base s’élève à 10,56 % des traitements des agents d’Etat et des collectivités affiliés à la CNRACL (Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales qui est le régime spécial de la Sécurité Sociale chargé de l’assurance vieillesse des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers).
L’Etat ne verse pas de cotisations : il paie directement les pensions de retraite de ses agents sur son budget. Cette charge est comptabilisée dans un compte appelé « Pensions » qui correspond à un taux de 74,28% du traitement brut des agents d’Etat. Ce taux peut se comprendre comme le taux de cotisation employeur nécessaire pour équilibrer le régime de retraite de base de ces agents d’Etat. Pour les militaires, ce taux s’élève même en 2017 à 126,07 %. Si l’Etat réalisait des versements de cotisations sur un taux équivalent aux salariés du privé (10,45 %), le régime serait fortement déficitaire. Ce déficit est donc actuellement financé par les contributions aux budgets de l’Etat (TVA, impôts sur les sociétés, Impôts sur le revenu…).
Les employeurs des agents des collectivités affiliés à la CNRACL cotisent eux à ce régime spécial par répartition géré par la Caisse des dépôts. Le taux de leur contribution est également élevé (30,65 %) et le budget qui permet de les financer est également alimenté par des fonds publics. Parmi ces agents, certaines catégories (aides-soignants, pompiers…) bénéficient de versements de cotisations supplémentaires par leur employeur.
Il est donc intéressant de noter que lorsque l’Etat et les collectivités locales réduisent leurs effectifs, ils augmentent mécaniquement la pression à la hausse sur leur taux de cotisations employeur, réduisant d’autant l’économie réalisée sur leur masse salariale.
Cependant, toutes les personnes travaillant dans la sphère de la fonction publique ne sont pas affiliées à ce régime. Il s’agit d’établissements publics, comme les universités par exemple, ou d’agents non titulaires de l’Etat. Agents comme employeurs cotisent alors aux mêmes taux que dans le secteur privé.
Cotisations vieillesse au régime de base pour un salaire inférieur au plafond de la sécurité sociale en 2018
Salariés du privé, agents non titulaire de l’Etat et agents des collectivités locales non affiliés au CNRACL | Fonctionnaires d’Etat | Agents des collectivités locales affiliés au CNRACL | |
Cotisation Salarié | 7,30 % | 10,56 % | 10,56 % |
Cotisation Employeur | 10,45 % | 74,28 % | 30,65 % |
Source : URSAFF, Direction générale des Finances publiques, CNRACL
Par ailleurs, les fonctionnaires ont également un régime complémentaire obligatoire appelé Régime de retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP) dont les cotisations portent, elles, sur leurs primes ou d’autres types de rémunérations exceptionnelles. Le taux s’élève à 5 % pour l’agent et 5 % pour l’employeur. Mais ces cotisations complémentaires ne peuvent porter que sur un montant plafonné à 20 % de son traitement brut. Ainsi, si un fonctionnaire perçoit un traitement brut de 1 000 euros et une prime de 300 euros, seulement 200 euros feront l’objet d’un prélèvement de cotisations destinées à sa retraite complémentaire.
Le taux de remplacement
Le taux de remplacement est le rapport entre le montant net de la retraite mensuelle (de base et complémentaire pour les salariés du secteur privé – mais hors retraite supplémentaire individuelle) et le montant net du dernier traitement, rémunération ou revenu. Il est donc un bon indicateur de la perte de revenu quand on prend sa retraite.
Deux constats ressortent :
- Le taux de remplacement demeure actuellement assez élevé : le plus souvent supérieur à 70 % pour les salariés non-cadres ayant une carrière complète. Il est cependant plus élevé pour les ouvriers et les employés que pour les cadres.
- Le taux de remplacement actuel des salariés du public et des salariés du privé sont de niveau à peu près comparable malgré un mode de calcul différent : les pensions du public continuent à ce jour d’être calculées selon un traitement indiciaire de fin de carrière prenant en compte les 6 mois précédant le départ à la retraite alors que dans le privé, le montant du salaire de base est reconstitué sur la moyenne des 25 meilleures années de salaire. Cependant, les primes des agents publics ne sont pas prises en compte dans l’estimation de leur pension.
Depuis 2016, une partie des primes des fonctionnaires a été introduite dans le calcul de leur pension. En effet, la part de ces primes n’a cessé d’augmenter dans le traitement global des fonctionnaires, ce qui amplifiait de plus en plus la baisse de leur revenu au moment de leur passage à la retraite.
Le COR (Conseil d’Orientation des Retraites) estime des taux de remplacement selon différents profils de salarié (cadre du privé, employé du privé avec ou sans période de chômage, fonctionnaire…). Leur rémunération est estimée en pourcentage du salaire moyen par tête (SMPT).
Le SMPT est calculé pour chaque trimestre à partir de la masse salariale brute versée (primes comprises) à l’ensemble des salariés. Selon l’INSEE, il s’élevait à 8 742 euros pour le 3e trimestre 2017, soit 2 914 euros bruts par mois.
Pour une personne née en 1955 et partant à 63 ans (soit en 2018) à la retraite, le taux de remplacement est donc le suivant :
Taux de remplacement net pour des cas types (génération 1955)
Cas type | Salaire brut de fin de carrière (et part des primes pour les fonctionnaires) |
63 ans |
Cadre du privé | 2,7 x SMPT | 57,8 % |
Non-cadre du privé | 0,9 x SMPT | 79,0 % |
Non-cadre du privé avec chômage à 45 ans et après 55 ans | 0,8 x SMPT de l’année des 56 ans | 75,9 % |
Femme non-cadre du privé avec deux enfants et une interruption de quelques trimestres à 30 ans | 0,8 x SMPT | 78,2 % |
Fonctionnaire sédentaire catégorie B | 1,2 x SMPT (dont 24 % primes) | 66,6 % |
Fonctionnaire sédentaire catégorie A à faible taux de prime (correspondant à un professeur) | 1,5 x SMPT (dont 9 % primes) | 80,2 % |
Fonctionnaire catégorie A+ à fort taux de prime | 2,7 x SMPT (dont 34 % primes) | 56,1 % |
Source : Conseil d’Orientation des Retraites – Rapport annuel juin 2017
Les taux de remplacement des salariés du privé devraient sensiblement se réduire dans les années à venir. Un salarié non-cadre de la génération de 1975 partirait à la retraite selon le COR avec un taux de remplacement oscillant autour de 67 % selon les différents scénarios. En revanche, le taux de remplacement des fonctionnaires restera stable à niveau de prime constant.
Le taux d’activité
Le taux d’activité est le rapport entre le nombre d’actifs (actifs occupés et chômeurs) et l’ensemble de la population correspondante.
Toujours selon le COR, le taux d’activité des 50-64 ans était de 65 % en 2016. Il s’agit d’une progression importante sur ces 20 dernières années, puisqu’en 1998 moins de la moitié de cette tranche d’âge était alors en activité. C’est la conséquence du recul de l’âge de départ à la retraite mais aussi des politiques pour soutenir l’emploi des « seniors ». D’ici 20 ans les projections du COR tablent sur un taux d’activité de 75 % des personnes entre 50 et 64 ans.
Bien qu’en progression, le taux d’activité pour les seuls « + de 60 ans » n’est lui que de 30 % (contre 11% 20 ans plus tôt). Le COR anticipe un doublement de ce taux d’ici 20 ans compte tenu de la nécessité de travailler plus tard pour obtenir une retraite à taux plein (entrée sur le marché du travail plus tardive, davantage de périodes de chômage).
Le taux plein correspond au montant maximum d’une pension à laquelle peut prétendre une personne : il dépend de la durée de cotisation qui s’allonge actuellement progressivement jusqu’à 43 ans (génération née en 1973). C’est pour cette raison, que des salariés ou des fonctionnaires travaillent au-delà de la limite de l’âge de départ à la retraite ( étendu à 62 ans) qui correspond davantage à un âge minimum légal où une personne peut faire valoir ses droits à la retraite qu’à son départ effectif.
Le taux d’emploi
Le taux d’emploi d’une classe d’individus est le taux d’activité diminué des personnes sans emploi. C’est donc un indicateur plus fin que le taux d’activité car il prend en compte des actifs qui ont effectivement un poste.
Le taux d’emploi pour les 50-64 ans est de 60, 6 % en 2016. On mesure ici le poids du chômage et des cessations d’activité non désirées qui ne sont pas toujours mesurées dans les statistiques de demandes d’emploi.
A titre de comparaison internationale, selon Eurostat, le taux d’emploi des 55- 64 ans dans l’Union Européenne était de 55,3 % contre 49,8 % en France. Seules la Belgique, la Grèce, la Pologne et la Roumanie font moins bien. En Allemagne, le taux d’emploi sur cette tranche d’âge est de 68,6 % ce qui en fait le leader de l’emploi des « seniors » dans l’Union Européenne après la Suède (75,5 %).
Ces différences résultent notamment des dispositions légales concernant l’âge de la retraite, qui est de 62 ans en France. De plus, à partir de 50 ans il est plus difficile de trouver un emploi stable et un retrait du marché du travail intervient parfois dès 58 ans pour les personnes ayant connues des carrières longues.
La faiblesse du taux d’emploi chez les « seniors » handicape le système de retraite français, notamment parce qu’il prive les régimes de retraite de cotisations supplémentaires et qu’il ne facilite pas l’allongement de la durée d’activité sur lequel repose les différentes réformes des retraites qui se sont succédées depuis 20 ans. En effet, la durée d’activité pour bénéficier d’une retraite à taux plein s’étant allongée, l’âge moyen de départ à la retraite tend à s’accroitre.