En octobre 1998, le Conseil des gouverneurs de la BCE a défini la stabilité des prix comme le maintien du taux d’inflation moyen dans l’ensemble de la zone euro à des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme. Pour parvenir à cet objectif, la BCE procède à une analyse régulière des différents indicateurs économiques et surveille l’évolution de la masse monétaire.
Approche à deux piliers
L’analyse par la BCE des risques pesant sur la stabilité des prix repose sur deux perspectives complémentaires, désignées sous le terme de « piliers » : l’analyse économique et l’analyse monétaire.
L’analyse économique
Elle vise à évaluer les facteurs déterminant l’évolution des prix à court et moyen terme, en mettant l’accent sur l’activité réelle et les conditions financières dans l’économie. Pour ce faire, la BCE analyse régulièrement l’évolution de la production globale, celle de la demande et de la situation sur le marché du travail, les politiques budgétaires, la balance des paiements de la zone euro ou encore les prix des actifs et les rendements financiers. Ceux-ci peuvent en effet servir à obtenir des informations sur les anticipations d’inflation par les marchés financiers. Par exemple, lorsque les investisseurs se mettent à vendre des obligations, cela peut signifier qu’ils anticipent implicitement que des tensions inflationnistes vont conduire à une hausse des taux d’intérêt (et donc à une baisse de la valeur des obligations).
L’analyse monétaire
Elle est axée sur un horizon à plus long terme, s’appuyant sur le lien à long terme supposé relier la quantité de monnaie en circulation et les prix (c’est la théorie quantitative de la monnaie).
C’est une stratégie proche de celle que pratiquait la Bundesbank avant son intégration à l’Eurosystème. Elle consiste à définir un taux de croissance de la masse monétaire au sens le plus large, que l’on appelle « M3 », (globalement de + 4,5 %, dans la zone euro) jugée compatible avec le maintien à moyen terme de 2 % de hausse des prix.
Cependant, la pratique de la politique monétaire au long des années tend à rendre en partie obsolète l’analyse monétaire. Tout d’abord car il est clair que la banque centrale n’a qu’un impact très indirect sur M3, qui est avant tout influencé par les décisions du secteur bancaire. Ensuite, par ce que la relation entre la masse monétaire et l’inflation est très distendue, et instable dans le temps.
Les opérations de politique monétaire de l’Eurosystème
La banque centrale agit par la fixation des taux d’intérêt qu’elle prélève lorsqu’elle fournit de la liquidité au système bancaire. C’est ce qu’on appelle les taux d’intérêt directeurs. Elle pilote ainsi les taux d’intérêt du marché monétaire, appelé aussi marché interbancaire.
Les modifications des taux d’intérêt directeurs influencent directement les banques et indirectement les taux appliqués par les banques aux prêts et aux dépôts de leurs clients. Une hausse des taux directeurs peut ainsi entrainer un resserrement du crédit ou une hausse de son coût, influençant les comportements de consommation, d’épargne et d’investissement des ménages et ceux des entreprises. Les modifications des taux d’intérêt directeurs influencent aussi les prix des actifs et les taux de change. La transmission aux conditions financières et économiques d’ensemble se fait également non seulement par les décisions de modification proprement dites mais aussi par les anticipations des acteurs économiques concernant de futures modifications des taux directeurs. L’anticipation d’un mouvement durable de hausse de ces taux pourra peser sur les taux d’intérêt à moyen et long terme.
Les Banques centrales nationales (BCN) servent de relais à la BCE pour la mise en œuvre de la politique monétaire, dans ce que l’on appelle l’Eurosystème.
La BCE et les BCN ont recours à trois instruments principaux pour piloter les taux d’intérêt : les opérations d’open market qui sont l’instrument le plus important, les facilités permanentes et les réserves obligatoires.
Les opérations d’open market
Elles sont constituées par prêts (parfois des achats) à court terme de l’Eurosystème aux banques en échange de titres détenus par celles-ci et donnés temporairement en garantie des prêts accordés (mécanisme appelé prise en pension). Il s’agit du principal instrument de politique monétaire de la BCE. Les titres acceptés en pension par l’Eurosystème peuvent être des titres de dette publique ou des obligations privées de bonne qualité. Des opérations d’open market sont effectuées très régulièrement, chaque semaine pour les opérations principales de refinancement. Le temps de prise en pension des titres est de trois mois pour les opérations de refinancement à plus long terme. En somme, les opérations d’open market sont des prêts sécurisés aux banques.
C’est la BCE qui fixe le taux d’intérêt en vigueur pour les opérations d’open market. Il s’agit de l’un des trois taux directeurs de la BCE, que l’on nomme le taux principal de refinancement (souvent surnommé le « taux refi »).
Les facilités permanentes
Les facilités permanentes de la Banque centrale européenne (BCE) permettent aux banques de gérer leur liquidité à très court terme. Elles comprennent deux instruments principaux : la facilité de dépôt, où les banques peuvent placer leurs excédents de liquidités à un taux fixé par la BCE, et la facilité de prêt marginal, qui permet d’emprunter des liquidités en cas de besoin au taux marginal. Les facilités de dépôts et les facilités de prêt sont rémunérées, respectivement, par le taux de rémunération des dépôts et le taux de prêt marginal.
Les reserves obligatoires
Les réserves obligatoires imposent aux banques de maintenir un certain niveau de dépôts sur un compte auprès de la BCE, proportionnel à leurs engagements (par exemple, leurs dépôts clients). En théorie, les réserves obligatoires limites la quantité de monnaie que les banques commerciales peuvent créer (via ce qu’on appelle le « multiplicateur monétaire »). Indirectement, cet instrument peut permettre à la BCE de contrôler la croissance économique et les prix.
En pratique, les reserves obligatoires ne sont plus vraiment utilisées par la BCE, et les banques centrales en général.
Autres instruments de politiques monétaires
En plus de ces instruments de politique monétaire dite « conventionnelle », la BCE a développée au cours des dernières décennies des outils « non conventionnels », que vous pouvez décrouvrir ici.
« Le » ou « les » taux directeurs de la BCE ?
Les trois taux directeurs
La banque centrale fixe les taux directeurs, qui sont les taux auxquels elle prête et emprunte aux banques commerciales. Indirectement, ces taux déterminent les taux d’intérêt sur tous les marchés : taux des dettes souveraines, taux des prêts immobiliers, taux des prêts aux entreprises…
Comme expliqué plus tôt, les taux directeurs sont au nombre de trois :
- Le taux principal de refinancement. C’est le taux auquel la BCE s’engage dans les actions de prises en pension auprès des banques commerciales, pour une durée d’une semaine.
- Le taux de prêt marginal. Il sert à prêter “en urgence”, via les facilités permanentes, aux banques commerciales qui ont des besoins imprévus de monnaie. Pour éviter que trop de banques improvisent au jour le jour, la valeur du taux de prêt marginal est élevée, afin d’être désincitative.
- Le taux de rémunération des dépôts. C’est le taux auquel la banque centrale rémunère les facilité de dépôt des banques commerciales.
Le corridor des taux directeurs
La Banque Centrale Européenne, en s’engageant sur ce marché, agit comme un lubrificateur du marché monétaire. Elle fixe les limites haute et basse du prix de la monnaie, et se porte prêteuse ou emprunteuse en cas de déséquilibre. Elle est donc un acteur incontournable de la stabilité financière.
Ces taux font apparaitre un plancher et un plafond sur le marché monétaire. Chaque banque a le choix d’emprunter et de prêter, soit à la banque centrale, soit à une autre banque. Il existe donc, en parallèle des taux directeurs, les taux du marché monétaire, qu’on peut considérer comme “privés”, puisque n’impliquant pas la banque centrale. Les plus connus de ces taux interbancaires sont l’€STR (prononcez “èstère”) et l’Euribor.
Cependant, les taux d’intérêt directeurs font apparaitre des arbitrages : en effet, quelle banque accepterait de prêter à un taux inférieur au taux de rémunération des dépôts, dont elle est certaine de pouvoir bénéficier ? De même, quelle banque accepterait d’emprunter à un taux supérieur au taux de prêt marginal ? La BCE pose ainsi des limites à la valeur des taux monétaires. Ces limites forment ce que l’on appelle le corridor des taux d’intérêt. Ce corridor est un instrument incontournable de contrôle des taux d’intérêt monétaires privés, et donc des taux d’intérêt en vigueur dans toute l’économie.
Ce corridor est théorique. Il est courant, depuis les années 2010, que les taux monétaires soient légèrement plus bas que le taux de dépôt marginal. Cela est dû à l’existence d’agents non bancaires, n’ayant pas le droit de déposer leurs liquidités auprès de la BCE, et qui acceptent donc de prêter à des taux moins élevés.
Bonjour, est-il possible de calculer l’élasticité des encours de crédit des banques commerciales par rapport aux taux directeur de la bce pour connaître l’impact de la variation des taux sur les encours. Merci d’avance.
Bonjour,
Il n’existe, à notre connaissance, pas d’estimations récentes de telles élasticités. Leur estimation est rendue délicate par le fait que de nombreux facteurs, outre la politique monétaire menée par la Banque centrale, peuvent expliquer les variations de l’encours des crédits : concentration du secteur bancaire, environnement macroéconomique étudié, etc.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Bonjour,
Quoi qu’il en soit la source demeure la même, la planche à billets en cas de crise, ce n’est pas condamnable car il faut sauver la situation. De ce fait la masse monétaire augmente (contrepartie…) et peut acheter tous les biens produits , donc inflation car si tout est acheté (en raisonnant par l’absurde) reconstruction des stocks difficile et crise énorme.
C’est un raisonnement à l’emporte pièce mais c’est la réalité.
Au final toujours la même situation, relévement des taux directeurs qui à terme bien sûr mettent en danger les Pays à gros déficits
Bonjour,
La politique monétaire de la BCE et ses rachats de dettes souveraines est elle un levier pour l’inflation ?
Bonjour,
Les Banques centrales vont avoir un rôle important à jouer avec le retour de l’inflation. En effet, si les politiques de taux d’intérêt directeurs bas et d’achats de titres n’ont pas provoqué de poussée inflationniste au cours de la décennie écoulée, l’augmentation de l’inflation depuis le début de l’année 2021 va certainement pousser les Banques centrales à restreindre leur politique monétaire dans les mois à venir.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Comment agit chacun des instruments de la politique monétaire sur le niveau d’inflation?
Bonjour,
Vous trouverez une réponse détaillée à votre question dans notre série d’articles consacrés à la politique monétaire : https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/politiques-economiques/theories-economiques/politique-monetaire/
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
En quoi le système bancaire est t’il le relais privilégié de la politique monétaire ?
merci d’avance
Bonjour,
Pour cette question, nous vous renvoyons au commentaire ci-dessous en date du 20 janvier 2021.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Quels sont les effets des interventions de la BCE sur la situation economique de la zone euros ?
Bonjour,
Sur cette question, nous vous renvoyons à notre article « Comment la BCE réagit à la crise du Covid-19 ? » (https://www.lafinancepourtous.com/2020/03/25/comment-la-bce-reagit-la-crise-du-covid-19/).
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Bonjour, Pensez vous que la BCE pourrait enviseager de ne plus avoir comme unique « bras armé » les banques et si oui qu’ elle serait ses alternatives pour vous . Fintech ? (assouplissement reglementaire )
Cordialement,
Bonjour,
La BCE est une Banque centrale et joue donc le rôle de « banque des banques ». Il est donc normal qu’une large partie de son action soit dirigée vers les établissements bancaires. Toutefois, la politique monétaire menée par la BCE influence les taux d’intérêt, le prix des actifs, ainsi les mécanismes de crédit ou encore la règlementation, et touche ainsi de très nombreux acteurs économiques et financiers.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
en quoi le système bancaire est il le relais privilégié de la politique monétaire
Bonjour,
Le système bancaire est un relai essentiel de la politique monétaire. D’une part, les outils de politique monétaire dits conventionnels, comme les taux d’intérêt directeurs, se répercutent directement sur les conditions de crédit offertes par les banques. D’autre part, la politique monétaire dite non conventionnelle consiste pour une Banque centrale à racheter des titres financiers, notamment auprès d’établissements bancaires, afin d’injecter des liquidités dans l’économie.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Bonjour, jai un devoir à rendre sur la potique monétaire de la BCE face a la crise du covid-19, neanmoins je ne sait pas comment m’y prendre (pour le plan)… pourriez vous , si vous etes daccord, m’indiquer l’organisation a suivre ?
Bonjour,
C’est un sujet que nous avons longuement traité, notamment dans nos articles d’actualité. Vous les trouverez à l’adresse suivante : https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/crises-economiques/crise-economique-covid-19/. En guise de point de départ, vous pouvez vous demander pourquoi la BCE a décidé d’intervenir, quels instruments elle a utilisés et dans quels buts.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Bonjour, quel est l’instrument traditionnel des banques centrales que la BCE n’a pas été utilisé? Par quel instrument a-t-il été remplacé ?
Bonjour,
Il est difficile de répondre à votre question sans élément de contexte, notamment temporel. La Banque centrale européenne (BCE) utilise de manière plus ou moins régulière trois instruments : les réserves obligatoires, les opérations d’open market et les facilités permanentes. Vous trouverez davantage d’explications à propos de ces instruments sur notre page consacrée à la politique monétaire : https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/politiques-economiques/theories-economiques/politique-monetaire/
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com