Pourquoi créer des Euro bonds ?
Aujourd’hui, pour financer leurs déficits, les États de la zone euro émettent des obligations (titres de dette auxquels peuvent souscrire des investisseurs privés ou publics) libellées en euros mais avec des garanties nationales.
L’obligation est rémunérée par un taux d’intérêt payé à son souscripteur, également appelé coupon. Les taux d’intérêt varient selon les pays émetteurs en fonction de leur capacité à rembourser leur dette à terme et de la solidité de leur économie et de leurs finances publiques.
Avec la création de la zone euro en 1999, tous les pays membres ont bénéficié d’une crédibilité renforcée auprès des investisseurs. Les taux d’intérêt ont convergé à la baisse. Cela a permis à des pays comme la Grèce, l’Espagne, le Portugal ou l’Irlande d’emprunter moins cher et d’alléger leur dette publique.
Cela s’est nettement dégradé avec la crise financière de 2007-2008. Le traité de Maastricht et le Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) imposaient aux États de maintenir leur déficit budgétaire en dessous de 3 % du PIB national et leur dette publique en dessous de 60 % du PIB. Mais ces règles n’ont pas toujours été respectées notamment par la Grèce mais aussi par de grands États comme l’Allemagne ou la France.
La crise a entraîné des déficits très élevés et persistants. A la fin de l’année 2010, la dette de la Grèce s’élevait à 143 % de son PIB, ce montant étant respectivement de 120 % pour l’Italie, 96 % pour l’Irlande et 82 % pour la France.
La situation économique a divergé entre des pays comme l’Allemagne ou les Pays Bas dont les économies sont compétitives et des pays comme la Grèce, le Portugal, l’Espagne et même l’Italie dont la compétitivité et les perspectives économiques paraissent durablement dégradées.
Dans ces conditions, les investisseurs se sont inquiétés des capacités des États à faire face à leurs engagements.
Les effets de la crise de la dette publique
Les prêts aux États grecs, irlandais ou portugais sont considérés comme plus risqués que ceux destinés à l’Allemagne. Les écarts se sont creusés entre les taux d’intérêt réclamés sur les obligations. Les taux d’intérêt sont devenus très élevés jusqu’à rendre la situation parfois insoutenable comme dans le cas de la Grèce.
Ainsi, la création en mai 2010 d’un Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF) a contribué à la discussion sur la possibilité pour l’Europe d’émettre des euro-obligations.
Une première émission obligataire de 5 milliards d’euros a eu lieu en janvier 2011 dans le but d’alimenter le plan d’aide à l’Irlande. La différence entre ces obligations émises par le FESF et les eurobonds est que dans le premier cas, les obligations sont assorties de garanties nationales à hauteur de la participation des États et dans le second, les euro-obligations seraient garanties par la zone euro dans son ensemble. Les euro bonds permettent donc véritable mutualisation de la dette, avec tous les risques que cela implique pour les pays.
L’idée de mettre en place des euro-obligations a été lancée fin 2010 par le Premier Ministre du Luxembourg Jean-Claude Juncker et le ministre des Finances italien Giulio Tremonti. Il s’agissait pour l’Europe d’apporter la preuve « de son engagement politique en faveur de l’union monétaire et économique et de l’irréversibilité de l’euro ».
Les taux payés par les pays européens sur leur dette à 10 ans peut varier assez fortement.
L’avantage principal de l’euro bond serait de « mutualiser » la dette en mettant tous les contributeurs au même niveau.
Selon certains économistes comme Cécile Antonin de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), le taux des euro-obligations devrait tenir compte des disparités dans les situations nationales et serait « une sorte de moyenne des différents taux au sein de la zone euro » (Le Monde 19 juillet 2011).
D’autres comme l’économiste André Gauron sont encore plus optimistes. D’après lui, « si l’offre, donc le niveau de l’endettement européen, est correctement maîtrisée, il n’y a aucune raison pour que le taux d’intérêt de euro-obligations soit supérieur au meilleur des taux nationaux actuels, donc à celui des obligations allemandes ».
L’opération offrirait aux investisseurs européens et même internationaux « Chine et Japon en tête, à la recherche d’une diversification de leurs avoirs de change, un actif de première qualité et extrêmement liquide ».
Les pays en difficulté pourraient par conséquent bénéficier de taux de refinancement plus faible qu’aujourd’hui tandis que des pays comme l’Allemagne, la France ou la Finlande paieraient plus cher leurs emprunts.
D’autre part, un taux d’intérêt commun empêcherait la spéculation sur les États en difficulté qui proposent aujourd’hui des taux d’intérêt très attractifs pour compenser le risque de défaut de paiement dû à la mauvaise santé de leurs finances publiques (notamment l’Italie). Le dispositif de notation des obligations d’État n’aurait plus d’impact immédiat sur les taux d’intérêt.
Comment fonctionneraient les euro-obligations ?
Dans un premier temps, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) créé en 2010 pourrait assumer le rôle d’émetteur de ces euro bonds. Il serait également possible de créer d’une Agence Européenne de la Dette (EDA) qui viendrait le remplacer.
La capacité d’émission d’euro-obligations se situerait à 40 % du Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Union Européenne. Au-delà de ce seuil, les pays devraient conserver la responsabilité du paiement de leur emprunt dont le taux d’intérêt serait plus élevé. Dans ce système, les pays les plus emprunteurs seraient encouragés à surveiller davantage leur déficit budgétaire pour ne pas atteindre ce plafond.
Selon d’autres, comme André Gauron, le paiement des charges financières sur les emprunts devrait rester national : « chaque État devra transférer à l’agence européenne qui émettra les emprunts l’exact montant d’impôts nécessaire pour couvrir les charges d’intérêt et de remboursement ». (Le Monde 5 /09/2011)
Une question de démocratie
Les interrogations sur la mise en place d’un tel système restent cependant fortes.
Les dirigeants allemands s’y sont toujours opposé, en particulier Angela Merkel. La chancelière affirme que « la concurrence sur les taux d’intérêt est une incitation à respecter les critères de stabilité » et ne souhaite pas voir se dégrader les taux d’intérêts allemands.
Les euro-obligations ne risquent-elles pas d’aggraver les comportements laxistes de certains États ?
C’est l’inquiétude manifestée par les économistes Romain Rancière et Aaron Tornelle : « En maximisant ainsi leur intérêt individuel, de façon décentralisée, les États ignorent l’effet collectif de l’accroissement des émissions d’eurobonds sur l’engagement des ressources fiscales futures de l’ensemble des pays de la zone euro. De cette forme de « tragédie des biens communs » résulte l’accumulation d‘une dette totale excessive, avec des conséquences dramatiques quand la prospérité vient à son terme ». (Libération 30 août 2011)
Le projet euro-obligataire suppose un remodelage profond de l’architecture politique de la zone euro, explique l’économiste Agnès Bénassy-Quere. « On ne peut concevoir une euro-obligation sans euro décision » (France Culture 8/9/2011). L’enjeu est que chaque pays puisse en définitive avoir confiance dans les stratégies budgétaires et économiques de ses pays partenaires.
Comment se fait il que des pays d’Afrique peuvent emprunter en euro bonds ?
Bonjour,
Un pays a la possibilité d’emprunter dans une devise différente de celle qu’il utilise généralement. On parle « d’eurobond » ou « d’euro obligation », même si ces obligations ne sont pas forcément libellées en euros. Ces eurobonds permettent aux pays qui les émettent d’accéder aux marchés financiers internationaux et d’attirer des investisseurs étrangers.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com
Le B.A. BA sur les eurobonds.