Genèse du Brexit
L’organisation de ce vote découle d’une promesse de campagne de David Cameron, l’ancien Premier ministre conservateur (et défenseur du maintien dans l’UE). Ce dernier n’est pas favorable à un scrutin, mais doit revoir sa position sous la pression des franges les plus radicales de son parti, et de la popularité croissante de partis eurosceptiques (notamment UKIP, « United Kingdom Independence Party »), grand vainqueur du scrutin européen en 2014.
Est-ce que le Royaume-Uni doit rester membre de l’Union européenne ?
Plus de 30 millions de Britanniques participent à ce vote, qui enregistre un taux de participation de 72 % (un record outre-Manche). Le « non » est majoritaire en Angleterre (53,4 %) et au Pays de Galles (52,5 %), alors que le « oui » s’impose en Ecosse (62 %) et en Irlande du Nord (55,8 %). En tout, les partisans d’une sortie de l’UE obtiennent un 51,9 % des voix, contre un 48,1 % pour les unionistes.
Brexit : la campagne du « non »
Les arguments en faveur d’un départ de l’UE sont structurés autour de quatre messages principaux :
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La bureaucratie européenne pénalise les entreprises britanniques.
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L’UE coûte trop cher et ne rapporte rien au Royaume-Uni.
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Le Royaume-Uni ne contrôle plus ses frontières.
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Le Royaume-Uni est pris au piège dans un projet fédéral européen.
Le calendrier du Brexit
Theresa May ne souhaite pas que le Brexit soit voté au Parlement, mais la Cour Suprême du Royaume-Uni impose que la sortie de l’UE soit validée par les parlementaires. Le vote a lieu le mercredi 1er février 2016, et le « oui » au Brexit l’emporte largement, avec 498 voix pour et 114 contre.
Le 29 mars 2017, Theresa May déclenche l’article 50 du traité de Lisbonne auprès du Conseil Européen.
C’est la première fois qu’un pays quitte l’UE.
La version de l’accord pour le Brexit est rejetée trois fois par les députés britanniques, et oblige à la Première ministre à repousser à deux reprises la date du Brexit, du 29 mars 2019 au 31 octobre 2019, plongeant le pays dans la paralysie politique et forçant Theresa May à démissionner. Elle est remplacée par Boris Johnson au poste de Premier ministre.
Deux principaux points de discorde subsistent : le statut de la frontière entre les deux Irlande, et le marché commun européen.
Pour sortir du blocage politique, des élections ont lieu le 12 décembre 2019. La nette victoire des conservateurs renforce la position de Boris Johnson, partisan d’un Brexit rapide. Le Royaume-Uni quitte officiellement l’UE le 31 janvier 2020, à minuit (23 heures à Londres).
Une phase transitoire se déroule ensuite, jusqu’au 31 décembre 2020, au cours de laquelle Londres et Bruxelles s’accordent sur les modalités de leur relation future (notamment sur les flux de personnes et de marchandises).
Les changements principaux imposés par le Brexit
Les changements les plus conséquents exigés par le Brexit concernent la circulation de marchandises, les droits de déplacement (voyages personnels et activités professionnelles), les démarches fiscales et le domaine universitaire.
Le mouvement de personnes et de marchandises sont maintenant sujets à des contrôles douaniers, ce qui pose de gros problèmes, au niveau de la frontière avec l’Irlande du Nord, qui fait toujours partie de l’UE. Le coût des études au Royaume-Uni a fortement augmenté pour les étudiants issus de pays Européens, et leur capacité à travailler sur place a diminué, un visa étant obligatoire.
Les conséquences économiques immédiates du Brexit
En 2016, avant le référendum, George Osborne, ancien chancelier de l’Échiquier, avait pourtant alerté des risques que posait la sortie de l’UE pour l’économie britannique : « un vote de départ représenterait un choc immédiat et profond pour notre économie. Ce choc plongerait notre économie dans une récession et entraînerait une augmentation du chômage d’environ 500 000 personnes ».
Depuis 2014, année où le Royaume-Uni avait enregistré une croissance exceptionnelle de son PIB de 3,1 %, l’économie a beaucoup fluctuée. En 2019, la croissance économique n’a atteint (selon les dernières estimations du FMI) que 1,2 %, son niveau le plus bas depuis 2012.
Malgré ceci, la performance du marché du travail reste remarquable, avec un taux de chômage de 3,8%, au plus bas depuis 40 ans, un taux d’emploi qui a atteint les 76%, son plus haut niveau depuis 1971 et une hausse généralisée des salaires, avec une progression de la rémunération réel de 1,5 % en 2018.
Le principal impact négatif du Brexit est pour l’instant une baisse de l’investissement des entreprises, qui manquent de visibilité. C’est notamment le cas dans l’automobile, un secteur qui dépend fortement de l’Europe pour ses exportations et ses approvisionnements en pièces détachées.
Brexit : les économistes estiment que le Royaume-Uni sera perdant
Le Financial Times, journal à la tendance unioniste, a interrogé un panel de 120 économistes et 75 % d’entre eux pensent que le Royaume-Uni est perdant avec le Brexit.
La Banque d’Angleterre avait dans un premier temps estimé que le Brexit sans accord pourrait réduire le PIB britannique de 8 %.
Elle a ensuite modifié sa prévision pour estimer la perte potentielle à 5,5 %, soit un choc plus important que la crise de 2008.
D’autres économistes, comme Paul Krugman, estiment la perte de PIB plus faible, autour de 2 % à long terme.
Des emplois sont également transférés de la City de Londres à l’Europe continentale. C’est le cas de l’Autorité bancaire européenne qui a déménagé de Londres à Paris. Il n’y a pour autant pas d’effondrement de la City, tel qu’attendu par un certain nombre de commentateurs.
C’est une quasi-certitude, le Royaume-Uni devrait perdre le « passeport européen », qui permet aux établissements financiers installés à Londres de vendre leurs produits et services partout dans l’UE.
Entre 5 000 et 10 000 emplois pourraient ainsi être déplacés de Londres à l’Europe continentale, selon une estimation de la Banque d’Angleterre, ce qui attire les convoitises de plusieurs villes européennes, au premier rang desquelles Paris, Dublin et Francfort.
Le Brexit et la perte du passeport européen
Le Royaume-Uni a perdu le « passeport européen », qui permet aux établissements financiers installés à Londres de vendre leurs produits et services partout dans l’UE.
Comme le précise la Banque de France : « les entités situées au Royaume-Uni ne sont plus autorisées à fournir des services d’investissement dans l’Espace Économique Européen du fait de la perte du passeport européen, sauf à y établir une succursale ou une filiale agréée ».
Conséquences économiques du Brexit à plus long-terme
Comme anticipé par de nombreux économistes, le Brexit n’a pas eu que des effets positifs sur le Royaume-Uni. La campagne « pro-Brexit » avait promis que les fonds dépensés envers l’Union Européenne seraient redirigés au profit du service de santé national, les NHS (National Health Services). Cependant, malgré la crise sanitaire, les fonds ne se sont pas retrouvés dans les caisses du NHS.
La pénurie de main d’œuvre est elle aussi devenue très prononcée. On compte 300 000 travailleurs ayant quittés le Royaume-Uni, et dont le retour est compliqué par les nouvelles exigences de visa. Rien que dans le secteur financier, plus de 7 500 emplois ont été déplacés vers l’Union Européenne.
Le marché du travail résiste bien face à la crise sanitaire. Cependant, le gouvernement a eu beaucoup de mal à combattre la très forte inflation qui s’est matérialisée dès le début de l’année 2021. Evidemment, il est très difficile de distinguer les répercussions directes du Brexit de celles de la pandémie, , mais l’on peut y déceler certains liens.
Bien que le bilan économique du Royaume-Uni ne soit pas des plus encourageant quatre ans après son effectivité, le pays a fait preuve, semble-t-il, une véritable résilience macroéconomique. Les conséquences durables ne sont cependant pas encore toutes visibles.
Excellente mise au point, précise et objective. Une question : quel sera le dispositif applicable au secteur financier en 2021 dans l’hypothèse d’un accord. Quelle sera la différence avec l’actuelle pério de transition ?
Bonjour,
Et merci pour vos encouragements ! A notre connaissance, la question de l’accès au marché européen par le secteur financier britannique est toujours en suspens. En l’absence d’accord, le secteur financier britannique subirait des conséquences négatives. La banque d’investissement Morgan Stanley a ainsi prédit une baisse substantielle de l’indice de la Bourse de Londres, ainsi que des cours des actions des banques britanniques. Le dispositif applicable au secteur financier en 2021 dépendra des termes de l’accord, si les représentants de l’UE et du Royaume-Uni parviennent à s’entendre, ou des arrangements ad hoc décidés avant la fin décembre.
Meilleures salutations,
L’Equipe de Lafinancepourtous.com