La politique monétaire de la banque centrale

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Chaque établissement bancaire est tenu de disposer d’un compte auprès de la banque centrale. C’est grâce à ces comptes bancaires que la banque centrale met en place la politique monétaire.

Premier instrument : le taux des réserves obligatoires

La banque centrale impose à toutes les banques commerciales de « déposer » sur leur compte auprès d’elle un pourcentage des dépôts qu’elles collectent. Si le taux des réserves obligatoires est de 1 %, cela signifie que si une banque accorde un crédit de 1000 €, elle crédite le compte de dépôt de son client d’autant et doit alors déposer 10 € à la banque centrale.

Plus le taux des réserves obligatoires est faible, plus les banques pourront accorder des crédits. Si la banque centrale décidait de baisser ce taux à 0,5 %, lorsqu’une banque prête 1000 €, elle ne devrait plus déposer que 5 € à la banque centrale au lieu des 10 € précédemment.

Inversement, si la banque centrale augmente ce taux à 2 %, les banques pourront accorder moins de prêts car pour 1000 € prêtés, 20 € au lieu de 10 € précédemment devront être déposés à la banque centrale et seront donc « gelés ». 

En pratique, cet instrument n’est plus vraiment utilisé par les banques centrales, et certaines d’entre elles, comme au Canada, en Australie ou au Danemark, ont en fait supprimé le taux de réserves obligatoires. Concernant la BCE, la seule modification du taux des réserves obligatoires remonte au 18 janvier 2012, où il est passé de 2 % à 1 %.

Deuxième instrument : les facilités permanentes

Quand une banque a besoin de liquidités pour honorer les paiements effectués par ses clients (si ses clients retirent plus d’argent de leurs comptes qu’ils n’en déposent), elle les emprunte à une autre banque.
De l’autre côté, quand une banque a des liquidités disponibles (ses clients remettent plus d’argent sur leurs comptes qu’ils n’en retirent), elle les propose aux autres banques. C’est ce que l’on appelle le marché interbancaire.
Les banques se prêtent pour des durées très courtes, allant de 24 heures seulement à un an. Les paiements entre banques se font exclusivement par l’intermédiaire des comptes qu’elles détiennent à la banque centrale. C’est pourquoi on parle de « monnaie banque centrale ».

Les taux d’intérêt sur le marché interbancaire servent de référence aux banques pour fixer les taux d’intérêt des crédits qu’elles accordent à leurs clients.

Les facilités permanentes sont des opérations de prêt ou d’emprunt de la banque centrale auprès des banques commerciales, souvent du jour pour le lendemain. En zone euro, les facilités permanentes permettent de fixer des taux d’intérêt planchers et plafonds sur les taux monétaires. 

Quand une banque ne trouve pas le montant nécessaire auprès des autres banques, elle peut s’adresser à la banque centrale qui va lui prêter ces liquidités (en zone euro, au « taux de prêt marginal »). La plupart du temps, la banque doit apporter à la banque centrale des garanties sous la forme de titres de créances de qualité qu’elle détient (ce qu’on appelle en finance des « collatéraux »). A l’inverse, si une banque commerciale a des réserves supplémentaires, elle peut se les voir rémunérer au jour le jour par la banque centrale (en zone euro, au « taux de rémunération des dépôts ». 

Si la banque centrale augmente les taux de ses facilités permanentes, les banques vont répercuter cette hausse sur le coût des crédits qu’elles accordent. Les agents économiques (ménages, entreprises, États) vont être plus réticents à emprunter et vont alors réduire leur consommation ou leurs investissements.

Inversement, si la banque centrale diminue les taux de ses facilités permanentes, les banques vont diminuer le taux d’intérêt de leurs crédits. Les agents économiques vont être plus enclins à emprunter et vont alors augmenter leur consommation et leur investissement.

Troisième instrument : les interventions sur le marché interbancaire

La banque centrale peut aussi également adopter une approche plus pro-active sur les marchés interbancaires : c’est ce qu’on appelle les « opérations d’open market ». La banque centrale propose aux banques commerciales des liquidités (souvent, pour une durée d’une semaine) en échange de titres financiers qu’elle garde comme garantie. Il s’agit du principal instrument de politique monétaire pour les banques centrales modernes. La banque centrale peut ainsi influencer plus directement les taux monétaires et diriger la quantité de monnaie sur les marchés interbancaires. En zone euro, la BCE s’investie dans des « opérations principales de financement », mais propose parfois des opérations exceptionnelles, en cas de gel du marché interbancaire ou de récession. 

    156 commentaires sur “La politique monétaire de la banque centrale”
    1. Bonjour,
      1) Une fois le montant des réserves obligatoires à la BCE atteint, quel est l’intérêt des banques commerciales à continuer à faire des dépôts à la BCE (réserves en excès) sachant que le taux de facilité de dépôt est actuellement négatif en zone euro ? Est-ce uniquement pour des raisons de stockage des liquidités et de leur mise en lieu sûr ?
      2) Si ma compréhension est bonne, la BCE a décidé de fixer un taux du marché interbancaire négatif conformément à son objectif de stabilité des prix qui implique d’encourager l’inflation jusqu’à un niveau proche de 2%. Le raisonnement ici est qu’un tel taux négatif incitent les banques commerciales à baisser les taux d’intérêts pour les épargnants et ainsi décourager l’épargne au profit des dépenses. Donc hausse de la demande et hausse des prix (inflation effectivement encouragée). Est-ce que ce raisonnement derrière la décision de ce taux négatif est bien correct ?

    2. Bonjour,

      La banque commerciale peut accorder un crédit même si elle ne dispose pas des ressources suffisantes parmi les dépôts de sa clientèle. Elle peut le faire en créant de la monnaie par un simple jeu d’écriture en créditant le compte de son client du montant du crédit (cf l’article sur la création monétaire : http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Creation-monetaire/La-creation-monetaire-comment-ca-marche) Par contre, si la banque n’a pas suffisamment de fonds propres pour respecter la norme prudentielle de solvabilité, elle ne pourra pas accorder de crédits supplémentaires (cf notre article sur les limites de la création monétaire : http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Creation-monetaire/Les-limites-a-la-creation-monetaire)

      Meilleures salutations.
      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    3. mrc bcp pour cette article
      ma question c’est « est-ce que la banque ne doit pas accorder de crédit s’elle n’a pas de réserves en monnaie »

    4. Bonjour,

      C’est la banque centrale qui détermine et conduit la politique monétaire. Elle le fait de manière indépendante dans la plupart des pays développés (en zone euro, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis notamment), mais pas dans les pays en développement dans lesquels la banque centrale est le plus souvent sous l’influence du gouvernement. En zone euro, c’est la BCE qui détermine la politique monétaire, mais concrètement ce sont les banques centrales nationales (comme la Banque de France) qui la mettent en œuvre dans leur pays respectifs.

      Meilleures salutations.
      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    5. Bonjour,
      Les réserves obligatoires fluctuent en fonction du montant total des dépôts gérés par la banque commerciale à ses clients. Si ce montant diminue, alors une fraction des réserves obligatoires se retrouve « libérée » et devient utilisable pour un autre emploi.

      Meilleures salutations.
      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    6. merci pour cette article qui est riche … alors ma question c’est quand est ce que les banques commerciales peuvent réutiliser le réserve obligatoire gelé à la banque centrale… merci d »avance svp veuillez me répondre le plus vite possible …

    7. Bonjour,

      C’est exact, nous avons corrigé dans le texte. Néanmoins, comme les crédits viennent gonfler les dépôts, le raisonnement reste le même. En effet, pour maîtriser les » fuites » (crédit accordé par une banque mais versé sur un compte dans une autre banque) la règle s’applique aux dépôts. Mais c’est bien le crédit qui est visé car c’est lui qui impacte l’agrégat M1 de la masse monétaire.
      Meilleures salutations.
      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    8. Bonjour,

      l’assiette des réserves obligatoires est constituée des dépôts reçus par les banques, pas des crédits qu’elles ont accordés.

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