Comment fonctionne le quantitative easing (assouplissement quantitatif) ?

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Le « quantitative easing » (QE), ou « assouplissement quantitatif » en français, est une mesure de politique monétaire dite non conventionnelle mise en place par une banque centrale lorsque ses outils traditionnels se révèlent insuffisants pour atteindre ses objectifs.

Origine et définition du quantitative easing

La première mention du concept d’assouplissement quantitatif est attribuée à l’économiste allemand Richard Werner, dans un article du 2 septembre 1995 du journal japonais Nihon Keizai Shinbun.

Le quantitative easing (QE) consiste, pour la banque centrale , à acheter massivement des titres financiers (en particulier des obligations). Ces achats sont un moyen d’injecter des liquidités dans l’économie, afin de relancer l’activité et l’inflation. Toutefois, l’efficacité de cette politique reste dépendante de l’état de l’économie, et de ses modalités précises.

Le quantitative tightening (QT, littéralement « resserrement quantitatif ») est, de manière schématique, la politique inverse du quantitative easing (QE, pour « assouplissement quantitatif »). Il consiste, pour la banque centrale, à vendre des titres, ou au minimum à de pas en acheter de nouveaux (les anciens titres arrivant petit à petit à maturité).

Comment le quantitative easing est-il mis en place ?

La banque centrale a un pouvoir de création monétaire théoriquement illimité. Cependant, dans le paradigme monétaire actuel, la monnaie en circulation dans l’économie est majoritairement créée par le système bancaire, par le crédit. La banque centrale n’a un pouvoir direct que sur ce que l’on appelle la “monnaie centrale”. La monnaie centrale est constituée de la monnaie fiduciaire (pièces et billets), ainsi que de réserves pouvant être vues comme des dépôts qu’ont les banques commerciales auprès de la banque centrale, et qu’elles s’échangent lors de leurs transactions.  Autrement dit, la banque centrale n’a qu’un contrôle très indirect sur la quantité de monnaie dans l’économie.

Le QE est un moyen d’augmenter la quantité de réserves des banques, qui est censé impacter indirectement la quantité de monnaie totale, en permettant aux banques de prêter. La banque centrale a deux solutions pour implémenter son QE :

  • Soit elle achète les titres de dette publique émis par le Trésor sur le marché primaire. Avec les liquidités ainsi obtenues, ce dernier va pouvoir payer ses créanciers (investisseurs internationaux, banques ou entreprises) et/ou ses fonctionnaires. Lorsque le Trésor utilise les liquidités créées par la banque centrale pour payer ses fonctionnaires ou ses fournisseurs nationaux, la quantité de monnaie disponible dans l’économie du pays augmente (la masse monétaire croît du montant considéré).
    Cependant, cette pratique est actuellement interdite dans la plupart des zones monétaires, dans un objectif d’indépendance des banques centrales vis-à-vis des États.
  • Soit elle rachète aux investisseurs (banques, assurances, fonds de pension, hedge funds, …) des titres sur le marché secondaire. Il s’agit généralement de titres de dette publique, mais il peut aussi s’agir de titres de dette privée, émis par des grandes entreprises. La banque centrale peut même acheter des actions. Avec les liquidités obtenues en échange de leurs titres, les investisseurs peuvent racheter de nouveaux titres sur le marché primaire et ainsi financer les États ou les entreprises. Les banques peuvent aussi accorder de nouveaux prêts directs aux ménages ou aux entreprises, puisque leurs réserves détenues auprès de la Banque centrale s’accroissent. Ainsi, les liquidités créées par la banque centrale sont injectées dans l’économie du pays pour autant que les investisseurs financiers les réutilisent au profit d’agents économiques nationaux.

L’efficacité du programme d’assouplissement quantitatif est théoriquement meilleure dans le premier cas de figure, car l’argent créé par la banque centrale va pour partie irriguer l’économie via les utilisations qu’en fait le Trésor, alors que dans le deuxième cas, la monnaie créée par la banque centrale peut irriguer la sphère financière sans certitude qu’elle vienne ensuite à la sphère réelle.

Quantitative easing par dessine moi l’éco

    15 commentaires sur “Comment fonctionne le quantitative easing (assouplissement quantitatif) ?”
    1. Bonjour
      merci de ces articles bien détaillés.
      En effet, je recherche à comprendre les approches théoriques de l’offre de monnaie puisque cette approche est vaste et demande plus de recherche.

      1. Bonjour,
        Nous ne disposons que peu d’éléments à ce sujet, mais vous pouvez consulter le manuel Monnaie, banque et marchés financiers de F. Mishkin. Vous y trouverez sans doute ce que vous recherchez.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    2. Bonjour,

      Quelle est la différence entre la politique monétaire conventionnelle Open Market et la politique non conventionnelle Quantitative Easing?

      1. Bonjour,
        De manière schématique, la principale différence réside dans l’instrument utilisé par la Banque centrale pour mener la politique monétaire. Dans le cadre de la politique monétaire conventionnelle, elle utilise des taux d’intérêt, nommés taux d’intérêt directeurs. La politique monétaire non conventionnelle de type QE repose, quant à elle, sur des achats de titres. Vous pouvez approfondir ce thème en lisant les autres articles composant ce dossier consacré à la politique monétaire.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

      1. Bonjour,
        La signification donnée à l’expression « faire marcher la planche à billets » change selon les circonstances. Au sens strict, elle renvoie à une situation où la Banque centrale crée de la monnaie pour financer directement le déficit public. Si l’on adopte cette définition, les programmes d’achats de titres ne sont pas synonymes de « planche à billets », puisque les Banques centrales ne contribuent qu’indirectement (en rachetant des titres sur le marché secondaire) au financement des Etats. Dans le cas européen, un financement direct est d’ailleurs prohibé par les Traités.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    3. Bonjour, dans les mois qui viennent comment vont évoluer les taux d’intérêt pratiqués par les banques commerciales de la zone euro, compte tenue de la dernière annonce de Christine L. ?

      1. Bonjour,
        Il est impossible de prévoir avec certitude la trajectoire des taux d’intérêt dans l’économie pour les mois à venir. Toutefois, comme vous l’indiquez dans votre commentaire, Christine Lagarde a annoncé une « normalisation » de la politique monétaire de la Banque centrale européenne au cours de l’année. La BCE a, en effet, indiqué le 10 mars vouloir resserrer sa politique monétaire en cessant certains programmes d’achats de titres ou en en réduisant les montants. Dans cette perspective, une hausse des taux d’intérêt est loin d’être exclue. L’évolution du contexte macroéconomique, notamment à la suite de la guerre en Ukraine, sera, toutefois, scrutée de près par les dirigeants de la BCE.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    4. Bonjour,
      Pourriez-vous préciser le statut de ce type de politiques (QE) : qui en prend la décision, quel en est le financement, y a-t-il des limites ?

      1. Bonjour,

        Les mesures d’assouplissement quantitatif relèvent de la politique monétaire. A ce titre, elles sont décidées par les Banques centrales qui sont, pour la plupart, indépendantes et disposent d’organes de décision. A la Banque centrale européenne (BCE), qui gère la politique monétaire de la zone euro, il s’agit du Conseil des gouverneurs. Ce dernier se compose de six membres du directoire et des gouverneurs des Banques centrales nationales des 19 pays de la zone euro. Les Banques centrales, bien qu’indépendantes, sont tenues d’agir en respectant la législation en vigueur. Pour la BCE, il s’agit des Traités européens. A propos de la légalité de ces programmes d’achat de titres, le site de la BCE indique : « Le programme est légal. La BCE met en œuvre la politique monétaire de la zone euro. Elle remplit son mandat de maintien de la stabilité des prix en recourant aux instruments définis dans les traités. Les achats fermes de titres négociables sont mentionnés explicitement comme un instrument de politique monétaire (cf. article 18.1 des statuts du SEBC). Cela comprend la possibilité d’acheter des instruments tels que des obligations souveraines, à condition que ces achats soient effectués sur le marché secondaire auprès d’investisseurs et non sur le marché primaire, c’est-à-dire directement auprès des différents pays ».

        Meilleures salutations,

        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

        1. Bonjour, et merci pour cette réponse.
          Les banques centrales sont indépendantes. Cependant, les montants des achats de titres qu’elles décident sont-ils illimités ?
          Bien à vous,

          1. Mdr la fed indépendante… ou banque des banques ? Et pour la BCE, aucune indépendance quand l’article 123 de Lisbonne interdit à la BCE d’émettre du crédit publique, la planche à billets ne sert donc qu’à renflouer les établissements en totale banqueroute depuis 2008.. Le BCE ne sert pas l’économie réelle, il n’y a aucun grand chantier d’avenir sauf quelques autoroutes en Espagne et un EPR qui ne parvient pas à sortir la tête de l’eau !

      2. Bonjour,
        A notre connaissance, la BCE décide seule des montants à allouer aux programmes d’achats de titres et les annonce clairement dans des décisions publiées au Journal officiel de l’Union européenne. La création monétaire liée à ces programmes pourrait donc sembler illimitée. La BCE doit, toutefois, rendre des comptes au Parlement européen. De plus, la conformité des décisions de la BCE peut être examinée par la Cour de justice de l’Union européenne. Cette dernière a, d’ailleurs, été à plusieurs reprises saisie pour statuer sur la légalité des mesures non conventionnelles de politique monétaire mises en œuvre par la BCE.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    5. cette politique a été utilisée depuis plus d’une décennie par la Fédéral Réserve aux USA pat la banque centrale japonaise et par la BCE plus récemment. Pourtant pas d’inflation ni ajustements à la hausse des taux . Il va falloir réviser la théorie.

      1. Bonjour,
        L’expérience historique montre en effet que le lien entre les politiques d’assouplissement quantitatif et l’inflation n’est pas systématique, comme nous l’expliquons dans notre article interrogeant l’efficacité de ce type de politique monétaire, disponible à l’adresse suivante : https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/politiques-economiques/theories-economiques/politique-monetaire/l-assouplissement-quantitatif/l-efficacite-de-l-assouplissement-quantitatif-en-question/.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

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