Les pays en développement, un groupe hétérogène
Dans les années 1970 et 1980, les PED sont majoritairement issus d’Amérique du Sud, d’Afrique subsaharienne et d’Asie.
Ils constituent, toutefois, un groupe relativement hétérogène. On compte ainsi parmi eux un certain nombre de nouveaux pays pétroliers, comme le Mexique, le Venezuela, l’Indonésie ou le Nigeria ; mais aussi d’autres acteurs émergents comme le Brésil, l’Argentine, la Côte d’Ivoire, le Zaïre (République Démocratique du Congo), les Philippines, la Thaïlande…
Quelle était la stratégie d’endettement des pays en développement ?
Une dette majoritairement externe
Dans les années 1970, les pays en développement (PED) sont caractérisés par un système financier interne faible :
- ils possèdent un accès limité aux marchés internationaux de capitaux ;
- leurs marchés financiers nationaux sont rudimentaires ;
- les systèmes de dépôts et de prêts bancaires nationaux sont très réglementés ;
- l’épargne nationale est faible.
Par ailleurs, après les chocs pétroliers successifs des années 1970, l’offre internationale de capitaux est élevée. En effet, les pays exportateurs de pétrole ont récupéré une quantité importante de dollars à l’occasion des hausses successives du prix du baril et les ont placés dans les banques occidentales.
On désigne sous l’expression « eurodollars », ces dépôts financiers de dollars effectués auprès de banques majoritairement situées en dehors des États-Unis.
Ces banques ont alors cherché à utiliser les capitaux récupérés par ce biais ; la libéralisation financière aidant, les pays en développement se sont trouvés être des candidats idéaux et accessibles.
De fait, les conditions d’investissement dans les pays en développement sont alors attractives pour les banques étrangères :
- de nombreux projets d’investissement subsistent dans les PED, tandis que les pays développés connaissent un ralentissement de l’activité économique ;
- les taux d’intérêt réels sont plus importants dans les PED car l’inflation y est plus modérée ;
- les PED semblent prometteurs, leurs recettes d’exportations de matières premières étant dynamiques.
Offre et demande de capitaux se rencontrent donc chez les pays en développement, lesquels se tournent vers l’épargne étrangère pour combler leurs besoins de financement. Cette stratégie d’endettement externe doit leur permettre de stimuler l’investissement national, puis la croissance économique, de manière à pouvoir rembourser l’emprunt à moyen ou long terme.
Une stratégie de croissance fragile
Dans les années 1970, la stratégie de croissance des pays en développement reposant sur l’endettement est fragile pour trois raisons principales :
- les ressources empruntées, n’étant finalement pas allouées à des projets stimulant l’exportation et la croissance de la productivité, augmentent à un rythme rapide tandis que la croissance potentielle baisse ;
- la structure de la dette est défavorable aux pays emprunteurs : près de 60 % de leur dette est détenue par des banques américaines, libellée en dollars et souvent à taux variable ;
- une large part des ressources de certains pays en développement repose sur l’exportation de matières premières, dont les cours sont, par définition, fluctuants.
Le financement des pays en développement est peu diversifié, sensible à l’évolution des conjonctures économiques et monétaires internationales, et utilisé de manière inefficiente. La hausse brutale des taux d’intérêt sur l’USD, organisée par P. Volcker entre 1979 et 1982 afin de lutter contre l’inflation aux États-Unis, et la récession qui s’ensuivit ont été des facteurs accélérateurs majeurs de l’insoutenabilité des finances publiques de ces pays.
Déclenchement de la crise dans les pays en développement
Lorsque la Réserve fédérale américaine (FED) décide d’augmenter brutalement ses taux d’intérêt à la fin des années 70, cela a plusieurs implications pour la dette des pays en développement :
- le montant des intérêts, indexé sur l’évolution des taux aux États-Unis, augmente sensiblement ;
- toutes choses égales par ailleurs, le coût réel de la dette augmente car le dollar s’est apprécié en raison de l’augmentation des taux d’intérêt aux États-Unis.
De plus, les recettes des pays en développement liées à l’exportation des matières premières chutent en raison de la récession mondiale.
En conséquence, leurs réserves de change en devises étrangères diminuent. Après les pays développés, ce sont donc les pays en développement qui entrent en récession.
Augmentation des coûts, baisse des ressources : le risque d’insolvabilité s’est réalisé.
Par exemple, dans les pays en développement d’Amérique Latine, le volume moyen des intérêts à rembourser est passé de 1,6 % du PIB en 1975 à 5 % en 1982.
Au Mexique, la dette publique de long terme a augmenté de 6 à 86 milliards de dollars entre 1970 et 1982, et ses réserves de change (à l’exclusion de l’or) passent de 4 milliards à 833 000 dollars entre 1981 et 1982. Faute de fonds, il ne peut plus faire face à ses engagements financiers et ne parvient pas à refinancer sa dette, en raison de la défiance des prêteurs internationaux. C’est le premier pays à annoncer sa défaillance. La majorité des pays d’Amérique latine et plusieurs pays d’Afrique et d’Asie sont, par la suite, confrontés à une telle crise.
Comment la crise de la dette des pays en développement a-t-elle été résolue ?
Une première initiative est la proposition de plan d’ajustement structurel (PAS) pour réorienter les économies des pays en développement, initiée par le G7 dès 1979 et mise en place en majeure partie par le Fonds monétaire international (FMI) à partir du milieu des années 1980. D’inspiration libérale, elle se décline en trois points : en contrepartie de prêts accordés par le FMI, le pays doit s’engager à réduire certaines dépenses publiques consacrées au social et à s’ouvrir aux importations et à l’exportation.
On propose aussi aux économies des pays en développement de rééchelonner leurs échéances de remboursement en contractant des prêts plus importants et à plus long terme. La charge devient astronomique : pour le Brésil, la dette publique passe de 50 à 100 milliards de dollars entre 1979 et 1989.
Ces recommandations de politique économique sont au cœur des critiques visant régulièrement le FMI.
En 1989, la titrisation met un terme à la situation en sortant les grandes banques créancières du défaut des sommes qui leur sont dues. C’est le plan Brady qui consiste à réduire le montant de l’endettement extérieur des PED en annulant au moins une partie de leurs dettes, par leur transmission au FMI qui en garantit le paiement. Concrètement, cette manipulation a été rendue possible en échangeant une partie des prêts bancaires non performants accordés aux pays en développement contre l’émission d’obligations.
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