Chili : un succès économique
L’histoire économique du Chili a été mouvementée. Dans les années 1970, le régime autoritaire d’Augusto Pinochet conduit un politique ouvertement libérale inspirée des « Chicago boys ».
Dans les années 1960 et 1970, l’université de Chicago était le centre du renouveau de la pensée libérale, notamment sous l’impulsion de Milton Friedman. Les économistes latino-américains formés à Chicago, qui ont ensuite appliqué la théorie libérale dans leur pays d’origine, ont été surnommés les « Chicago boys ».
Cette politique libérale stimule la croissance, mais elle conduit également à un excès d’endettement qui causera une violente crise en 1982-1983. A partir du milieu des années 1980, et suite au retour à la démocratie dans les années 1990, le pays mène une politique à la fois libérale (développement des entreprises privées, ouverture commerciale…) mais maintient un contrôle de l’État sur l’économie (contrôle des capitaux par exemple).
Le Chili, surnommé « le jaguar », connaît alors une longue période de croissance, jusqu’à devenir le pays le plus prospère d’Amérique du sud (selon la mesure du PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat). Cette progression est d’autant plus remarquable qu’en 1980, le Chili était sensiblement moins prospère que l’Argentine, le Brésil ou l’Uruguay.
La croissance chilienne a certes ralenti depuis 2014, notamment du fait de la baisse du prix du cuivre dont le pays est un important producteur, mais elle a rebondi en 2018 à plus de 4 %. L’inflation est sous contrôle, le taux de chômage historiquement faible à moins de 7 %, et la dette publique limitée à 25 % du PIB.
Pourtant, les Chiliens descendent dans la rue pour faire entendre leur mécontentement.
Des indicateurs sociaux en demi-teinte qui alimentent le mécontentement populaire
Fin octobre, des manifestations parfois violentes ont éclaté suite à la hausse du prix des tickets de métro.
Les causes du mécontentement populaire sont cependant plus larges que le prix du transport.
Comparé à des pays voisins comme le Pérou, la Bolivie ou l’Argentine, la situation des Chiliens semble avantageuse. Cependant, les inégalités sont élevées au Chili.
L’indice de Gini, même s’il est en baisse constante, est de 46,6 (chiffres Banque Mondiale 2017), un niveau comparable aux pays voisins mais sensiblement plus élevé que dans les pays développés (il est de 32,7 en France).
L’indice de Gini mesure l’inégalité de la répartition des revenus dans un pays. Il se situe entre 0 (égalité parfaite des revenus où chacun perçoit un revenu équivalent) et 1 (inégalité totale où une seule personne capte tous les revenus).
Les manifestants réclament aussi une amélioration des services publics, dont certains ont d’ailleurs été partiellement privatisés et dont le coût a augmenté. A ce titre, notons la place médiocre qu’obtient le Chili dans les classements sur le niveau d’éducation, par exemple le pays ferme souvent la marche dans les tests PISA effectués dans les pays de l’OCDE.
De plus, la personnalité du président Sebastián Piñera, un richissime homme d’affaires qui a paru se désintéresser des questions sociales, a pu alimenter le ressentiment de la population à l’égard des élites politiques et économiques.