Le Covid-19 met le pétrole sous pression
La crise sanitaire actuelle et le confinement qui touche environ la moitié de la population mondiale conduisent nécessairement à une chute de la demande de pétrole d’environ 30 %, donc à une baisse du prix.
De plus, en mars, l’Arabie Saoudite et la Russie ont accru leur production de façon à faire chuter le prix du baril encore plus bas. Cette stratégie, a priori surprenante, avait notamment pour objectif d’asphyxier les producteurs de pétrole de schiste américains. Début avril, l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) et la Russie ont changé de stratégie et se sont engagés à réduire leur production de 10 %. Mais face à une baisse de la demande de 30 %, les prix sont restés très bas.
Alors qu’avant le déclenchement de l’épidémie, le baril de pétrole brent tournait autour de 65 dollars, il est momentanément passé sous les 20 dollars, soit le prix le plus bas en 20 ans.
Un prix du pétrole négatif, mais uniquement aux États-Unis
L’expression « le prix du pétrole », couramment utilisée, peut être trompeuse. En effet, il existe plusieurs types de pétroles ayant chacun un prix différent.
Les deux principaux sont le brent (pétrole de mer du Nord), et le West Texas Intermediate (ou WTI, soit le pétrole américain). Leurs prix diffèrent du fait de leur spécificité (teneur en soufre notamment) et de leur lieu de livraison.
Seul le pétrole américain (WTI) a vu son prix tomber en dessous de zéro dollar. Comme l’ensemble des marchés pétroliers mondiaux, le prix du WTI est pénalisé par le confinement qui bride la demande. Aux États-Unis, les capacités de stockage sont proches de la saturation, avec une offre toujours abondante (un puits de pétrole ne se ferme pas comme un simple robinet). De ce fait, le pétrole extrait peine à trouver un lieu de stockage physique, ce qui a poussé certains producteurs à payer pour se débarrasser d’un pétrole dont ils ne savaient que faire, autrement dit, le prix est devenu négatif.
Précisons le fonctionnement du marché pétrolier. Un acheteur a le choix entre acheter du pétrole au cours actuel (prix spot) ou avec une livraison différée dans le temps (souvent un mois), par exemple en anticipation d’un besoin futur et pour gérer au mieux ses stocks.
Dans le cas d’un achat avec livraison différée, on parle de contrat à terme (ou « future » en anglais), qui sont des engagements fermes de livraison d’un actif (ici du pétrole) à une date et à des conditions établies à l’avance.
La date d’échéance pour les contrats à terme de mai pour le WTI était le mardi 21 avril. Or, les capacités de stockage étant saturées, les détenteurs de tels contrats se sont précipités pour les revendre, notamment le lundi 20 avril. Cette frénésie de vente a fait plonger le prix des contrats à terme pour livraison en mai en territoire négatif (jusqu’à – 40,3 dollars dans la journée du 20 mai, et – 37,6 dollars à la clôture).
Le prix spot du pétrole a quant à lui clôturé à – 36,98 dollars lundi 20 avril.
Ce plongeon pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour les producteurs de pétrole de schiste aux États-Unis, qui ont besoin d’un prix du baril d’environ 50 à 60 dollars pour être profitables. Ces entreprises étant lourdement endettées, d’éventuelles faillites pourraient avoir des conséquences sur les marchés financiers, déjà malmenés depuis plusieurs mois par la pandémie du Covid 19.